Tribune libre de Jérôme Pigniez pour Silver Valley : l’expérimentation – du cercle vicieux au cercle vertueux

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Dans le cadre du Silver Valley Mag, un magazine numérique destiné à tous les professionnels de la Silver économie, Jérôme Pigniez, Président d’ON-MEDIO SilverEco.fr, le portail national de la Silver économie, a livré une analyse critique du modèle des expérimentations telles qu’elles sont pratiquées actuellement en Silver Economie.

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Le cercle vicieux de l’expérimentation

Soyons clairs, les expérimentations ont un rôle indéniable en matière de recherche, de validation d’une preuve de concept. Mais le fait est que le concept d’expérimentations, telles qu’elles sont actuellement menées en matière de Silver économie ou de gérontechnologie, a dévié de cet objectif initial.

Les expérimentations sont aujourd’hui menées dans le cadre de lancement de produits/services. A ce titre, le constat est cinglant : elles ne permettent pas d’ouverture de marché, sinon celui de l’expérimentation lui-même et des expérimentateurs.

Lorsqu’on analyse les expérimentations au niveau Européen, on remarque qu’il y a un réel problème dans l’Hexagone. En effet, la France en matière de produit/services dédiés au bien-vieillir est à la quête du « Graal », du produit parfait, bref celui qui n’existe pas…

Lorsque des résultats mènent à un résultat positif à 85% par exemple, on a fortement tendance en France à demander de revoir la copie, et donc, de refaire une expérimentation, pour atteindre les 100%. Dans les pays anglo-saxons, on voit le verre à moitié plein, les entrepreneurs s’emparent rapidement d’un résultat à 85% pour lancer la production de leur offre de produit ou service.

Critique de la méthode

Le modèle actuel des expérimentations s’apparente à un cercle vicieux :

  • Les cohortes d’utilisateurs (d’usagers… !) sont souvent très faibles.
  • Dans la plupart des cas, ceci ne permet pas d’avoir des résultats fiables ou intéressants.
  • Ce qui se solde souvent par une absence officielle de publication, bien que ces études soient supportées par des fonds publics.
  • L’absence de publication ne permet pas à une éventuelle nouvelle expérimentation de s’appuyer sur ces résultats pour faire avancer globalement la recherche.
  • Ajoutons qu’une autocritique de la méthode expérimentale est rarement menée, on se contente d’une critique du produit expérimenté.
  • On assiste donc au fait que des expérimentations identiques sont plusieurs fois renouvelées dans une logique contre-productive.
  • Autre problème de taille, les produits sujets à expérimentation sont donnés aux personnes qui doivent les tester. Comment savoir combien ces personnes seraient prêtes à payer pour ce même produit qu’elles ont eu gratuitement ? Quelle analyse critique réelle des produits est faisable alors qu’il s’agit d’un « cadeau » ? Selon les théories de Freud, payer son psychanalyste fait partie du processus thérapeutique ! Pourquoi payer un produit expérimenté ne ferait-il pas partie du processus analytique d’une expérimentation ?
  • Enfin, du point de vue sémantique, le côté « expérimental » a tendance à rendre les acheteurs professionnels frileux.

Silver Valley Mag sur l'expérimentationLes expérimentations actuelles ne permettent pas l’accès au marché. Dans les cas les plus extrêmes, des entrepreneurs s’enferment dans cette logique de « cercle vicieux », à la recherche du développement du produit parfait en oubliant le fait de chercher de véritables consommateurs, clients. Ou alors se tournent vers les expérimentations afin de continuer à financer un projet qu’ils n’arrivent pas à vendre…

Le temps de l’action : passer en mode Projet

Au-delà des améliorations simples mais nécessaires aux process d’expérimentations (plus grande cohorte, obligation de publications des résultats et autocritique de la méthode), passer d’une logique d’expérimentation à une logique « projet » consiste à valider avant tout le concept commercialement. Car à quoi bon développer un produit miracle si personne ne veut l’acheter !?

L’idée est que les fonds financiers (publics) mis à disposition pour la mise en place d’expérimentation soient utilisés pour aider les porteurs de projets à :

  • Finaliser leur offre commerciale.
  • Identifier un panel, une cible potentielle de clients (en conservant le côté local ou régional des expérimentations).
  • Garantir le remboursement du produits/service en cas d’insatisfaction du client, ce via une clause de remboursement soutenue par les collectivités qui financent à ce jour les expérimentations.

L’idée est d’aider à trouver de réels clients qui adhérent à l’offre proposée. Et si in fine il n’y a pas d’adhésion malgré la garantie remboursement : ce n’est pas la peine d’aller plus loin, ni de chercher à développer absolument un concept produit qui ne trouve pas d’acheteur.

Ce mode de fonctionnement a par ailleurs l’avantage de couter moins cher à la collectivité en terme de financement.

En conclusion, les expérimentations ont toutes leur place dans le domaine de la recherche, mais en ce qui concerne le développement de marchés, le lancement de produits/services, il n’y a pas de meilleure expérience que celle de vendre à de véritables clients un projet, un produit, un service et d’écouter leurs remarques pour rentrer dans un process d’amélioration continue.

Si c’est ici la logique de « consommateurs » qui est préférée à celle « d’usagers », c’est parce que considérer les personnes âgées en qualité de consommateurs, c’est les considérer tout court, c’est respecter les choix de chacun, les droits, et le libre arbitre.

Focus sur le Silver Valley Mag

Le Silver Valley Mag est un magazine numérique destiné à tous les professionnels de la Silver économie. Son ambition est de proposer un éclairage sur des enjeux stratégiques de la filière régionale.

Dans ce dernier opus, le Mag aborde la thématique de l’expérimentation, une thématique chère à Silver Valley puisque prendre les risques financiers d’accompagner des solutions en devenir, c’est tout l’objet de la Bourse Charles Foix, l’ADN de Silver Valley.


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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