La seconde stratégie “Agir pour les aidants 2023 – 2027” annoncée le 6 octobre dernier n’apporte que des solutions insuffisantes au regard des nombreux besoins des 11 millions d’aidants. Leur contribution essentielle n’est toujours pas reconnue, en témoigne le peu de moyens financiers accordés pour les soutenir. Le Collectif Je t’Aide déplore un rendez-vous manqué avec les aidants et les structures qui les représentent.
Des avancées insuffisantes au regard de l’ampleur des besoins des aidants
Le Collectif Je t’Aide souligne dans cette stratégie quelques avancées, demandées par les associations, tels l’ouverture d’un congé de proche aidant par proche aidé, la création d’une campagne de communication sur le rôle des aidants et de nouvelles places de répit, la simplification administrative, l’élargissement des bourses pour les étudiants aidants, le développement des plateformes de répit, la création d’une ligne d’écoute et la saisine du CESE pour produire un rapport sur les aidants en activité professionnelle.
Toutefois, ces avancées sont dérisoires au regard des besoins des aidants. En témoignent les 6 000 places de répit à horizon 2027, alors que la France compte 11 millions d’aidants. Le Collectif Je t’Aide regrette également que le congé de proche aidant, malgré son extension, soit rémunéré à hauteur du Smic et non pas du salaire de l’aidant, seulement sur les trois premiers mois, et qu’il exclut toujours les aidants de personnes malades. La promesse des 15 jours de répit annoncés par Emmanuel Macron semble irréalisable au regard des moyens alloués, du faible taux de solutions d’accueil par département et de la méconnaissance des dispositifs existants qui sont parfois inaccessibles en raison de difficultés administratives. Par ailleurs, les aidants souhaitent avoir accès à une diversité de solutions de répit adaptées à leurs situations qui sont amenées à évoluer. Enfin, la pérennisation du relayage à domicile de longue durée n’est pas garantie, malgré ses résultats exemplaires durant les 5 ans d’expérimentation. Pire, au 31 décembre 2023, l’expérimentation sera terminée et aucune suite n’est annoncée.
Les aidants attendaient une stratégie d’envergure avec un plan d’action à moyen et long terme, qui reconnaisse leur engagement, avec des moyens alloués conséquents pour réduire durablement les injustices sociales qu’ils subissent quotidiennement, et qui les pénalisent pour exercer leur pleine citoyenneté. Aider les aidants est un véritable enjeu de santé publique et de prévention de leur santé qui devrait nous alerter collectivement
Corinne Benzekri, Présidente du Collectif Je t’Aide
Une stratégie largement en-deçà des enjeux
Voilà un an que le Collectif Je t’Aide et les associations attendaient cette nouvelle stratégie, qui avait été annoncée le 6 octobre 2022 par le Ministre Jean-Christophe Combe. L’attente de co-construction était forte car la stratégie avait été renommée “Agir avec et pour les aidants”. Ce changement de nom n’a pas été suivi d’effets car, bien que consultées par le gouvernement, les demandes des associations n’ont pas été prises en considération dans cette seconde stratégie et elles en ont appris le contenu par voie de presse. Vieillissement de la population, virage domiciliaire, crise du secteur de la santé et du médico-social, augmentation des maladies chroniques, ces enjeux conséquents et déjà soulignés par les associations, n’ont pas été pris en compte dans cette stratégie.
- Les droits et dispositifs existants excluent toujours les aidants de personnes malades (congé de proche aidant, les points de bourse pour les étudiants aidants…). Or, l’Assurance maladie dénombre plus de 20 millions de personnes atteintes de maladie chronique, avec, à leurs côtés, des aidant.es qui les accompagnent au quotidien.
- VAE des aidants : cette VAE ouverte aux aidant.es ne correspond, à date, qu’aux métiers de l’aide et de l’accompagnement, alors que les compétences développées par les aidants sont transversales à tous les métiers.
- Des trimestres de retraite seulement accordés à certains aidants (aidants de personnes en situation de handicap) et dont les modalités restent à ce jour opaques et restrictives.
- Le gouvernement ne prévoit pas la formation des professionnels de l’Education Nationale : c’est une occasion manquée de prolonger l’expérimentation qui avait eu lieu au cours de la 1ère stratégie aidants.
- L’engagement des entreprises est quasiment absent, alors que la 1 ère stratégie avait permis d’impulser le sujet. La charte d’engagement des entreprises « parent-aidant » lancée le 6 Octobre dernier est un vrai recul car elle ne s’adresse qu’à une partie des aidants, et n’a pas été élaborée avec les acteurs du secteur. De plus, une partie des aidants qui travaillent ne sont pas salariés, et doivent donc être pris en compte via d’autres dispositifs et solutions.
- Le Collectif Je t’Aide déplore qu’aucune enquête statistique, qui permettrait de mieux cerner les besoins des aidants ne soit déployée.
De réelles inquiétudes sur le financement et la mise en œuvre de cette stratégie
Quels moyens seront dédiés à ces mesures ? Comment seront-elles financées ? Seuls l’ouverture du congé de proche aidant et les places de répit semblent avoir été budgétés. Le Collectif Je t’Aide exprime son inquiétude quand il fait le constat que le PLFSS 2024 ne mentionne même pas les aidants. Cette inquiétude provient aussi du constat que l’annonce de financements n’équivaut pas nécessairement à leur utilisation. Preuve en est, le rapport IGAS 2022 au sujet du plan national de renforcement et de diversification des solutions de répit pensé dans le cadre de la stratégie nationale des aidants 2020-2022 qui constate que “la consommation des crédits de ce plan est en retrait par rapport aux ambitions initiales puisque 22 % de l’enveloppe notifiée (soit seulement 13,5 M€ sur les 52,5 M€ de mesures nouvelles pour 2018-2022) ont été consommés mi 2022”.
Le Collectif Je t’Aide alerte aussi sur la nécessité de dédier de véritables moyens financiers mais aussi de s’assurer de la mise en place concrète de ceux-ci dans la stratégie “Agir pour les aidants” 2023-2027.
Il porte en ce moment une pétition citoyenne, suite à la tribune publiée le 6 octobre, signée par 130 structures et membres d’associations, acteurs et actrices de santé et du médico-social, parlementaires, élus locaux, experts et personnalités publiques, pour exiger que le Gouvernement reconnaisse la valeur et le rôle des aidants et mette en place des mesures concrètes à la hauteur des enjeux.
Cet article a été publié par la Rédaction le