Le rapport annuel du Conseil d’orientation des retraites (COR) montre un excédent de 900 millions d’euros des différents régimes pour 2021 après un déficit de 18 milliards d’euros l’année précédente. Pour l’exercice en cours, ce résultat pourrait même atteindre 3,2 milliards d’euros. Toutefois, alors que le gouvernement envisage toujours une réforme du système français de retraites, le COR anticipe une détérioration sur les 25 prochaines années.
Rebond du solde global du système de retraite en 2021 et 2022
Selon le COR, « la forte hausse du résultat entre 2020 et 2021 s’explique principalement par la conjonction de deux facteurs :
- le rebond de l’activité, qui a tiré les ressources vers le haut
- le faible impact de la surmortalité des retraités liée à la Covid sur les dépenses de retraite »
Dans le détail, les ressources pour 2021 s’affichent à 346 milliards (13,8 % du PIB). Ce montant provient pour 79 % des cotisations des travailleurs en activité. Outre les salariés et indépendants, les salariés portés paient également des cotisations de retraite en portage salarial. Le relèvement des taux dans les régimes de base et complémentaires a permis une augmentation des cotisations. Cependant, celle-ci a été minorée par les allégements de cotisations patronales sur les bas salaires.
Côté passif, les dépenses brutes ont atteint 345,1 milliards d’euros, avec un rythme de progression annuelle de 2 % depuis 2002 sous l’effet de la revalorisation des pensions et des départs massifs des baby-boomers.
Vers un déficit du régime, au moins jusqu’en 2032
Pour le COR, « les résultats du rapport contredisent les affirmations selon lesquelles la dynamique des dépenses de retraites n’est pas contrôlée par rapport à l’évolution du PIB ». Néanmoins, elles seraient supérieures aux dernières prévisions. Leur part dans le PIB passerait ainsi de 13,8 % en 2021 à 13,9 % en 2027, avant une accélération à 14,2 % en 2028 et 14,7 % en 2032. À plus long terme, dans l’hypothèse d’une croissance de productivité de 0,7 %, elles diminueraient à 12,1 % et en 2070, elles s’établiraient à 13,7 %.
En conséquence, l’embellie risque de ne pas durer. Les projections du COR annoncent « à partir de 2023 un déficit du solde global compris entre -0,5 et -0,8 point de la richesse nationale sur la période 2022-2032 en fonction du scénario de croissance retenu ». Plus largement, sur les 25 prochaines années, le Conseil annonce une « moyenne déficitaire du système de retraite français ».
La dégradation de sa santé financière est attribuée entre autres aux mesures d’économies appliquées aux rémunérations des fonctionnaires. Concrètement, sans augmentation des salaires et des effectifs, le montant des cotisations perçues par la CNRACL a été plus faible que prévu. Ce décalage a ainsi pesé sur la part des ressources dans le PIB.
D’après le COR, « la date de retour à l’équilibre peut varier sensiblement en fonction de la croissance annuelle de la productivité du travail ». Il interviendrait :
- au milieu de la décennie 2030 avec une moyenne de croissance de 1,6 % ;
- au cours des années 2040 si la croissance est inférieure à 1,3 %
- dans les années 2070 dans le cas d’une croissance de 0,7 %.
Une réforme du système de retraites justifiée ?
Bien que n’ayant pas pour rôle de prendre position sur la nécessité d’une refonte du système de retraite, qui reste une prérogative de l’Exécutif, le COR émet quelques réserves. Il estime ainsi qu’« en dépit d’une stabilisation des dépenses de retraites en pourcentage de PIB entre 2022 et 2027, leur évolution risque de ne pas permettre l’atteinte des objectifs gouvernementaux inscrits dans le programme de stabilité de juillet 2022 ».
En effet, ils anticipent une progression de 1,8 % en termes réels pour la période. Or, étant constituées pour 23,4 % des dépenses de retraites, les dépenses publiques ne pourraient pas tenir la croissance en volume de 0,6 % requise. En conséquence, l’urgence serait davantage à l’amélioration pérenne des financements qu’à un changement en profondeur.
Le gouvernement se retrouve face à une question épineuse concernant la fameuse réforme souhaitée par le Président. Le ministère du Travail et les partenaires sociaux se rencontrent d’ailleurs.
Il reste que, d’ores et déjà, les syndicats ont prévenu le gouvernement de manifestations et de boycott des concertations sociales si des mesures relatives aux retraites sont introduites dans les débats concernant le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Ils redoutent notamment une « accélération de la réforme Touraine », qui porte sur l’allongement progressif de la durée de cotisation. Avec ce texte, cette durée atteindra à terme 43 ans pour les générations de 1973 et ultérieures.
Cet article a été publié par la Rédaction le