Xerfi vient de publier une étude sous le titre : « Le marché des résidences seniors : comment concrétiser l’immense potentiel de croissance ? – Une base de données exclusive sur le secteur et les dynamiques régionales pour décrypter les stratégies d’innovation et d’adaptation »
Il ne faut jamais juger sur les apparences. Bien que le parc de résidences services pour seniors (RSS) n’ait augmenté que de 69 unités en 2022, soit un peu moins de 5 500 logements, cette contre-performance s’explique par le report de certaines mises en exploitation à 2023 en raison de la crise sanitaire. En réalité, le marché des RSS n’a jamais été aussi florissant, renforcé par l’image et la visibilité accrues dues à la crise. Les années 2021 et 2022 ont vu une multiplication de projets en anticipation de l’effet du papy-boom sur la demande. En fin de compte, le parc de résidences services pour seniors enregistrera une croissance record avec 264 unités supplémentaires (soit 25 410 logements) prévues d’ici fin 2024, portant le total à plus de 1 300 résidences (environ 106 580 logements) qui accueilleront plus de 122 000 seniors, pour la plupart des femmes vivant seules, selon les experts de Xerfi Precepta. Mieux encore, on prévoit que 240 nouvelles résidences pour près de 22 000 nouveaux logements sortiront de terre entre 2024 et 2026. Cependant, il ne faut pas ignorer les particularités du marché. Cette solution résidentielle intermédiaire nécessite une méthodologie d’implantation adaptée, des stratégies marketing et commerciales dédiées ainsi que le déploiement de stratégies de services.
Jusqu’à présent, le marché des résidences pour seniors était basé uniquement sur la réponse pertinente à un besoin latent de sécurité et de lien social chez les seniors cherchant à préserver leur autonomie. Depuis 2021-2022, il commence à bénéficier de la croissance massive de la population cible (+2,9% par an d’ici 2035 pour les personnes âgées de 75 ans et plus autonomes ou à risque de perte d’autonomie (GIR 5-6), qui atteindront 6,6 millions à cette époque). Étant donné que l’âge moyen d’entrée en RSS est de 80 ans, les effets de cette croissance pourraient ne se faire sentir qu’après 2031. Cette population nombreuse est compatible avec les différents concepts de RSS (ayant des préférences élevées pour les services, la mobilité et la prévention de la perte d’autonomie). De plus, cette génération facilitera l’expansion du marché et maintiendra les taux d’occupation des résidences.
En d’autres termes, l’expansion de l’offre pour les baby-boomers est une opportunité exceptionnelle pour les promoteurs et les exploitants de RSS. Bien que cette dynamique soit étroitement liée à l’arrivée et à l’avancement des baby-boomers dans la tranche d’âge des 75 ans et plus, elle aura un impact significatif dans des régions telles que les Hauts-de-France, les Pays de la Loire, la Bretagne et la Normandie.
S’implanter dans des zones privilégiées et des territoires délaissés
Il ne « reste » donc plus qu’à concrétiser cet énorme potentiel de croissance. Cependant, les acteurs du marché vont se montrer sélectifs en ne déployant pas leurs concepts dans toutes les régions. En effet, 90% des logements qui seront mis en exploitation d’ici 2024 seront situés dans les centres-villes des villes-centres ou des communes de banlieues appartenant à des unités urbaines de 15 000 habitants et plus, où environ 60% des 75 ans et plus résident. En effet, le développement du marché ne se limite plus aux régions bénéficiant d’atouts naturels tels que les littoraux ou les zones tempérées et ensoleillées.
Aujourd’hui, les décisions stratégiques sont déterminées par plusieurs facteurs clés, notamment l’augmentation du nombre de seniors autonomes ou en risque de perte d’autonomie qui font face à des problèmes d’adaptation de leur logement actuel, la proportion de seniors vivant seuls ainsi que leur niveau de vie. En utilisant ces critères, une nouvelle répartition des projets émerge, conduisant à une croissance sans précédent des RSS dans des régions comme les Hauts-de-France et le Centre-Val de Loire.
En réalité, les acteurs du marché des résidences seniors vont être confrontés à un double défi. Le premier, d’ordre démographique, concerne l’optimisation du cycle de développement immobilier, les conditions d’activité et l’aménagement des modèles d’exploitation pour faire face à la hausse de la demande. Actuellement, les trois quarts de l’offre se concentrent sur des territoires qui regroupent moins de la moitié des seniors de 75 ans et plus. Le second défi, d’ordre sociologique, nécessite une diversification des concepts de RSS pour répondre aux nouvelles exigences en matière de mobilité et de choix, compte tenu de la grande hétérogénéité de la population cible. Ainsi, les résidences « nouvelle génération » pourront proposer des options « intégrées » ou « à la carte », tandis que les résidences « ancienne génération » suivent le modèle de la copropriété.
Le rythme de croissance du marché sera donc déterminé par la capacité des opérateurs à satisfaire la demande dans les zones d’implantation prioritaires, mais aussi à étendre leur offre à l’avenir à des territoires qui ont été négligés ou qui ne sont actuellement ciblés que par des projets d’habitat partagé (comme les colocations pour seniors ou les béguinages).
Déployer des stratégies marketing et de services
Les acteurs du marché cherchent toujours à concrétiser le potentiel de croissance en mettant en place des stratégies marketing et commerciales spécifiques. Ils utilisent notamment le marketing d’innovation pour élaborer collectivement une offre innovante adaptée. À cet égard, des entreprises comme Domitys et Les Senioriales ont adopté le Design Thinking. Les exploitants peuvent également recourir à des techniques de marketing hors ligne, telles qu’un centre d’appels ou un plan média. En outre, le marketing numérique est un outil puissant pour générer des prospects, ce qui est essentiel étant donné la montée en puissance des seniors de plus en plus connectés.
En tant qu’habitat regroupé adapté, la RSS occupe une place centrale dans un écosystème de services visant à enrichir son offre et sa promesse de valeur. Pour ce faire, il est essentiel de s’associer à des opérateurs spécialisés tels que Domidom et Les Villages d’Or, tout en développant des services en interne, tels que des Services d’Aide et d’Accompagnement à Domicile (SAAD) à Villa Médicis. La capacité de la résidence à proposer une solution globale articulée autour d’un ensemble de prestations est également un facteur de réussite important. À cet égard, la réforme en cours des services à domicile pourrait contribuer à harmoniser les pratiques des réseaux.
Avec le soutien continu d’AG2R La Mondiale et de son partenaire privilégié Nexity, le leader du marché Domitys (qui représente plus de 21% des logements fin 2022) devrait consolider sa position dans un avenir proche. Après avoir reporté plusieurs ouvertures l’année dernière, le groupe prévoit d’ouvrir 59 nouvelles résidences d’ici la fin de 2024, ce qui lui permettra de dépasser la barre symbolique des 200 RSS gérées. Derrière Domitys, quatre autres enseignes ont également franchi la barre symbolique des 5% de parts de marché (exprimées en nombre de logements), à savoir Les Senioriales, Les Girandières, Les Jardins d’Arcadie et Les Villages d’Or. Ce top 5 est resté stable depuis plusieurs années.
Auteur de l’étude : Jean-Christophe Briant
Cet article a été publié par la Rédaction le