Xerfi vient de publier une étude sous le titre :« Les résidences seniors au cœur des nouveaux parcours résidentiels des personnes âgées. Analyse territoriale du marché et stratégies de croissance des acteurs
à l’heure de la massification et de la diversification des besoins ».
Renforcement de la visibilité des résidences seniors
La crise sanitaire aura eu peu d’impact sur le marché des résidences services seniors (RSS) dans l’Hexagone. En réalité, elle aura surtout renforcé la visibilité et l’image de la RSS, plus que jamais pertinente pendant les confinements alors que nombre de personnes âgées ont souffert de l’isolement à leur domicile et les EHPAD ont été frappés de plein fouet par la pandémie. Le parc de résidences services seniors aura ainsi augmenté de 170 unités entre fin 2019 et fin 2021 pour frôler la barre symbolique des 1 000 résidences (972 RSS pour 75 675 logements). Et il devrait atteindre 1 147 RSS pour 92 273 logements fin 2023, susceptibles d’accueillir plus de 106 000 seniors (87 000 fin 2021), selon les calculs des experts de Xerfi Precepta. Le cap des 1 300 RSS pourrait même être franchi fin 2025.
Les moteurs de croissance ne manquent pas entre la croissance de la population des 75 ans et plus, la bonne adéquation entre l’offre et la demande ou encore la solvabilité de la demande. À tel point que séduits par la reconnaissance du concept, les perspectives de développement exceptionnelles, des taux de rendement solides et la reconversion a priori facile des immeubles, les investisseurs soutiennent et façonnent aujourd’hui la croissance du marché. Chez certains, le « produit » RSS est même un élément à part entière de leurs stratégies de diversification de leurs portefeuilles d’actifs immobiliers.
Pour l’exploitant gestionnaire et le promoteur, la vente en bloc à des investisseurs institutionnels permet de limiter les frais de commercialisation et de gestion locative mais aussi de réduire le temps de commercialisation des produits. La montée en puissance de la vente en bloc sécurise ainsi le flux d’investissement au sein du marché en complétant le flux plus fragile des investissements individuels. C’est également l’occasion de tisser des liens étroits avec des partenaires puissants partisans de relations stratégiques durables. C’est le sens du partenariat de 165 millions d’euros signé en juillet 2020 entre Aquarelia (UNITI) et Primonial REIM pour créer et gérer une vingtaine de RSS à l’horizon 2023. Sauf qu’il y a un revers à la médaille. En privilégiant la solidité financière et la réputation de l’exploitant, la pertinence du projet et de son implantation et la qualité du business plan prévisionnel, les investisseurs institutionnels sont également une source d’éviction et de concentration qui ne facilite pas la diversification des stratégies d’implantation et des concepts des acteurs du marché.
Timides évolutions des stratégies d’implantation et peu de nouveaux concept…
Aujourd’hui, les résidences services seniors sont massivement implantées dans des unités urbaines de 15 000 habitants et plus. Ces zones qui regroupent plus de 59% des seniors de 75 ans et plus concentrent 81,7% des résidences pour 87,6% des logements fin 2021. Des chiffres qui passeront respectivement à 82,5% pour 87,9% fin 2023. Pourtant, on observe certaines inflexions avec une volonté d’élargir le champ d’action géographique pour répondre aux besoins de sécurité et de lien social dans des régions comme le Grand Est, Auvergne- Rhône-Alpes et les Hauts-de-France. De la même façon, de plus petites unités urbaines (15 000 à 100 000 habitants) sont aujourd’hui ciblées. Enfin, on constate un réel développement – certes lent – dans les unités de moins de 15 000 habitants, porté par des acteurs historiques ou des nouveaux entrants sur la base du modèle « tout à la carte ». Ces zones sont ainsi la cible d’acteurs comme Les Senioriales, Sérénya ou les Résidences Héraclide.
Les papy boomers aspirent à disposer d’une large palette de solutions d’habitat, que leur choix résulte d’une envie (mobilité des seniors autonomes) ou d’un besoin de lien social et de sécurité (mobilité des seniors fragilisés). Dans ce contexte, trois voies sont possibles pour les acteurs, de l’avis des experts de Xerfi Precepta. La première est celle de la différenciation socio-économique à l’image d’UNITI avec les RSS avec services intégrés d’entrée de gamme gérées par sa filiale Aquarelia ou l’enseigne haut de gamme Palazzo développée par les Girandières (groupe Réside Etudes). Le ciblage des seniors selon leurs préférences et leur autonomie est également une autre possibilité. L’enseigne Oh Activ (Homnicity) se distingue ainsi par son extrême ouverture sur l’environnement extérieur. Une logique de parcours résidentiel est enfin une autre option, source de mutualisation pour l’exploitant de la RSS. C’est le cas de presque toutes les résidences proposées par des groupes de maison de retraite comme Orpea, Korian ou encore Emera.
Le respect de modèles économiques « rigoureux », surtout quand ils reposent sur l’investissement privé bride néanmoins le développement de nouveaux concepts. Prépondérante en raison de sa notoriété croissante et son dynamisme, la RSS n’a pas le monopole en matière de solution d’hébergement pour les personnes âgées. Un espace concurrentiel à la frontière du marché des résidences services seniors se développe en effet, porté par les solutions d’habitat partagé comme la colocation ou le coliving, l’habitat intergénérationnel ou l’habitat inclusif.
… mais une légitimité accrue
L’implication croissante des géants du bien légitime la résidence services seniors et transforme en profondeur le marché. Les bailleurs sociaux, à l’image de CDC Habitat avec le soutien des Villages d’Or, souhaitent ainsi répondre au manque de mobilité des seniors dans un parc HLM pas forcément adapté à leurs besoins. Les géants de la perte d’autonomie et les groupes de maisons de retraite se positionnent de plus en plus dans une activité en amont de leur cœur de métier. Des acteurs de proximité comme le Groupe La Poste ambitionnent de créer et exploiter des RSS dans des bâtiments de son patrimoine. En quête de diversification cohérente avec leur cœur de métier, des groupes de protection sociale s’intéressent de très près au marché, à l’image d’AG2R La Mondiale qui a racheté le leader des RSS Domytis (Aegide) courant 2021. Et qui pourrait bien faire des émules.
Cet article a été publié par la Rédaction le