Réforme des retraites, loi sur le bien vieillir, … les politiques publiques de ce début d’année n’ont pas permis une réelle prise en compte et reconnaissance des aidant.es, voire les ont davantage précarisé.es, alors qu’ils.elles jouent un rôle crucial dans notre société. La stratégie nationale de mobilisation et de soutien des proches aidants 2020-2022 n’a été que partiellement mise en œuvre et son volet 2, pourtant annoncé en octobre 2022 tarde à venir. C’est pour alerter les pouvoirs publics sur la nécessité d’agir pour les aidant.es que le Collectif Je t’Aide publie son 6ème plaidoyer : « Articulation des temps de vie des aidant.es : enjeux et solutions ». A travers cette thématique, le Collectif Je t’Aide met en évidence les défis complexes et spécifiques de l’articulation des temps de vie des aidant.es. Il souligne l’urgence d’apporter des réponses adaptées et concrètes pour faciliter leur vie » Il soumettra 20 propositions au Gouvernement pour construire la suite de la stratégie nationale.
Un plaidoyer sur la question de l’articulation des temps de vie des aidant·es
Le manque de temps et la difficile articulation des temps de vie sont des dénominateurs communs à l’ensemble des aidant.es. Quel que soit leur âge, genre, situation professionnelle, lieu de vie, ils doivent toutes et tous cumuler plusieurs rôles : scolarité et études, vie professionnelle, vie familiale, vie sociale et vie personnelle. Cette multiplicité des rôles a de forts impacts sur les aidant.es qui souffrent d’un manque de temps, d’un épuisement physique et mental, de précarité et d’isolement. De plus, aider creuse les inégalités entre les femmes et les hommes, les catégories socio-professionnelles, les territoires, le nombre et la situation des personnes aidées et la situation familiale et personnelle. C’est pourquoi, pour son sixième plaidoyer, le Collectif Je t’Aide et ses membres abordent la question de la difficile articulation des temps de vie des aidant.es. L’objectif de ce plaidoyer est de mettre en lumière la manière dont tous.tes les aidant.es voient leur temps de vie s’articuler autour de leur rôle d’aidant.e et d’en mesurer les impacts sur trois temps de vie : la jeunesse, la vie professionnelle et la retraite. Il a l’ambition de démontrer qu’il est urgent de comprendre les enjeux globaux et transversaux de l’aidance et présente 20 propositions aux pouvoirs publics afin de les relever.
Dans un contexte où les annonces faites en 2022 tardent à venir et où les résultats ne sont pas visibles par les aidant.es, ce plaidoyer montre les impacts présents et à venir sur la vie des aidant.es quel que soit leur âge. Le Collectif Je t’Aide fait 20 propositions concrètes pour donner des droits réellement effectifs à tous les aidant.es.
Corinne Benzekri, Présidente du Collectif Je t’Aide
Un impact considérable sur les jeunes aidant.es
Bien que sous-quantifiées, les situations de jeune aidance sont de plus en plus observées. Être aidant.e d’un.e proche tout en étudiant et en se construisant socialement, professionnellement et psychiquement relève d’un défi quotidien pour des centaines de milliers de jeunes de moins de 25 ans en France. La jeune aidance est un sujet dont les pouvoirs publics se saisissent progressivement mais qui nécessite un accompagnement encore plus important. En effet, l’aidance se met en place à une période décisive de leur vie : celle où leur identité se construit. Et pourtant, il est observé un “glissement de rôles” entre les membres de la fratrie, les parents et les enfants : les jeunes aidant.es peuvent devenir le.la confident.e d’un parent aidant.e, ou encore gérer les ressources économiques de la famille, ayant des conséquences sur leur scolarité.
Si l’aidance vient influencer leurs choix académiques et professionnelles, en raison d’un manque de temps et de moyens, la question de la précarité des jeunes aidant.es se pose aussi.
J’ai choisi un lieu d’étude proche géographiquement et rapidement accessible (et pas un choix de cœur). Retour au domicile familial chaque week-end pour relayer ma mère. Aucun engagement associatif possible à la fac et une socialisation limitée.
Témoignage d’une jeune aidante
La difficile articulation temps de travail et temps d’aidance
En 2030, 1 actif sur 4 sera aidant.e. L’aidance représente aujourd’hui un véritable défi pour les employeur.euses et services RH, mais aussi pour les aidant.es eux.elles-mêmes, qui souhaitent maintenir leur activité professionnelle. Si le cadre légal a évolué pour les salarié.es aidant.es depuis 2020, le congé de proche aidant, rémunéré au SMIC reste encore insuffisant.
Force est de constater que, pour s’occuper de leur aidé.e, certain.es aidant.es réduisent leur temps de travail, voire arrêtent de travailler, avec pour conséquence directe une baisse de leurs revenus et une cotisation plus faible à la retraite, accentuées pour les catégories socioprofessionnelles les moins aisées et pour les femmes. A noter que dans 8 cas sur 10, les familles monoparentales ont une femme à leur tête. Seules à assumer les responsabilités familiales et domestiques, elles jonglent entre éducation, santé, scolarité et loisirs des enfants, entretien de la maison, courses, démarches administratives… et portent seules la charge économique et mentale du foyer.
(Je souhaiterais) un aménagement d’horaires, sachant que je ne peux travailler que 2 jours par semaine parce que ma fille est hospitalisée 2 jours par semaine, le reste du temps je dois m’occuper d’elle.
Témoignage d’une aidante
Un impact non négligeable sur le temps de la retraite
L’aidance a non seulement des répercussions sur la fin de carrière, mais aussi sur la retraite des aidant.es. L’enquête du Credoc Retraité et proche aidant souligne que plus d’un tiers des aidant.es de l’échantillon a dû anticiper son départ à la retraite et la moitié des futur.es retraités a dû réduire ses heures de travail. A souligner que ce sont davantage les femmes qui sont amenées à quitter leur emploi, à occuper un poste à mi-temps ou à 80%, influant alors sur leurs droits à la retraite.
Alors que la réforme des retraites prévoit la création d’une assurance vieillesse aidants, cette mesure concerne un nombre d’aidant.es très limité : les aidant.es de personnes en perte d’autonomie et de personnes malades en sont exclu.es, ainsi que les aidant.es de personnes en situation de handicap inférieur à un taux qui reste à définir. 9 aidants sur 10 ne perçoivent aucune contrepartie financière pour leur engagement (90 %) alors que le reste à charge est une des problématiques prioritaires pour les aidant.es. Il est urgent de réfléchir aux manières d’informer et de reconnaître le rôle de ces aidant.es une fois leur carrière achevée.
Ayant arrêté de travailler pour soutenir mon conjoint lourdement handicapé, ma pension de retraite est ridicule. Et mon rôle d’aidante n’a jamais été reconnu suffisant pour m’ouvrir des droits à la retraite.
Témoignage d’une aidante
20 propositions pour faire avancer les droits des aidant.es
La stratégie nationale « Agir pour et avec les aidants » n’a été que partiellement mise en œuvre et l’annonce du volet 2 tarde à être annoncée. C’est parce qu’il est urgent d’agir que le Collectif Je t’Aide soumet 20 propositions aux pouvoirs publics autour de ces 3 temps de vie.
Cinq propositions prioritaires :
- Former les professionnel.les au repérage et à l’orientation des aidant.es quel que soit leur âge
- Rendre effectif le droit au répit par le développement et la diversification des solutions de répit adaptées et par la création et le soutien aux plateformes de répit et d’accompagnement
- Déployer des moyens financiers pour limiter le reste à charge des aidant.es et des aidé.es
- Développer les actions d’information et de soutien aux jeunes aidant.es
- Accompagner les aidant.es dans leurs parcours professionnel (bilan de compétences, valorisation des compétences développées durant l’aidance, ouverture de droits à la formation)
Source : Communiqué de Presse du Collectif Je t’Aide
Cet article a été publié par la Rédaction le