La nutrition a-t-elle un impact sur la mémoire ? 3 questions à Hélène Amieva et Guillaume Ferreira

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L’adage est bien connu, avoir une alimentation variée et équilibrée, associée idéalement à la pratique d’une activité physique, aide à rester en bonne santé et procure un sentiment de bien-être. A l’approche de l’été, la question de l’alimentation revient sur le devant la scène, notamment par le biais des différents régimes alimentaires. Est-ce que l’alimentation a un réel impact sur la mémoire ? Selon les différents types de régimes alimentaires, est-ce que ces derniers peuvent agir positivement ou négativement sur le vieillissement cognitif ? Le jeûne, tendance qui se démocratise, est-il bon pour la mémoire ? Hélène Amieva, Professeur des Universités en Psychogérontologie et membre du Conseil Scientifique de l’Observatoire B2V des Mémoires, et Guillaume Ferreira, Directeur de recherche nutrition et cerveau à l’INRA à Bordeaux, nous éclairent sur ces questions.

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L’alimentation a-t-elle un impact sur la mémoire ?

Si le cerveau ne représente que 2% du poids corporel, il utilise jusqu’à 25% de nos apports énergétiques provenant de l’alimentation. Il est donc naturel de penser que l’alimentation va influencer le fonctionnement du cerveau et les grandes fonctions qu’il contrôle telle la mémoire. En effet, des études cliniques et expérimentales chez l’animal s’accordent pour dire qu’une alimentation déséquilibrée, riche en lipides saturés et en sucres (correspondant à un régime obésogène c’est-à-dire qui favorise l’obésité), a un effet délétère sur la mémoire. Toutes les mémoires ne sont pas affectées de façon équivalente. Certaines mémoires dépendantes de l’hippocampe, telle que la mémoire épisodique (chez l’homme ou son équivalent chez l’animal), semblent particulièrement vulnérables aux effets de cette alimentation déséquilibrée. La vigilance est de mise à l’adolescence, période de fin de maturation du cerveau et notamment de l’hippocampe, hypersensible à notre environnement, en particulier alimentaire. Des études récentes indiquent effectivement une vulnérabilité accrue de cette période développementale aux effets de l’alimentation hyperlipidique et sucrée sur la mémoire. Pour garantir de bonnes capacités de mémoire tout au long de la vie, c’est donc dès le plus jeune âge qu’il faut veiller à garder une alimentation aussi diversifiée et équilibrée que possible.

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Il existe différents types de régimes alimentaires ; est-ce que ces derniers peuvent agir positivement ou négativement sur le vieillissement cognitif ?

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L’alimentation apporte de nombreux nutriments qui contribuent au maintien des fonctions physiques et cérébrales. Pour autant, si les liens entre alimentation et fonctionnement cérébral sont réels, ils sont aussi très complexes. En effet, l’alimentation va au-delà du contenu de l’assiette (ou du verre) ; elle englobe l’acte de se nourrir, rythme les journées et les relations sociales de la personne. C’est pourquoi considérer l’alimentation au travers de quelques aliments « miracle » est bien trop réducteur. Aucun aliment, quelles que soient ses propriétés, ne permet à lui seul d’améliorer notre mémoire ou encore réduire les effets du vieillissement sur notre cerveau. C’est un ensemble de nutriments, exerçant des effets synergiques qui, au long cours, peut avoir un effet bénéfique sur notre santé cérébrale. A ce jour, les données scientifiques les plus robustes sont en faveur du régime dit « méditerranéen ». Ce régime est caractérisé par un apport important de céréales complètes, de poisson, de fruits et légumes, d’ail, d’oignon, par l’utilisation de l’huile d’olive comme principal corps gras, la consommation quotidienne de légumineuses, de noix et graines, de yogourt et de fromage, la consommation moyenne de poulet, d’œufs et d’aliments sucrés, très peu de viande rouge, et un apport calorique quotidien raisonnable (de 1 800 à 2 500 calories par jour). L’effet protecteur de ce régime sur les maladies cardio-vasculaires a été amplement démontré et les mêmes nutriments pourraient concourir à limiter les lésions cérébrales vasculaires et retarder le déclin de la mémoire chez les personnes avançant en âge, voire diminuer le risque de développer une maladie d’Alzheimer.

La tendance du jeûne tend à se démocratiser. Est-ce que jeûner est bon pour la mémoire ? Ou à l’inverse, est-ce qu’il est préférable de l’éviter ?

Le jeûne est une pratique très en vogue dont on ne cesse de vanter les vertus. Certes, des effets bénéfiques sur le système immunitaire et sur les maladies inflammatoires sont possibles. Qui plus est, des résultats suggèrent que le jeûne induirait une augmentation de la production d’une protéine appelée BDNF, un facteur neurotrophique qui favorise la neurogenèse. De là à affirmer que jeûner est bénéfique pour notre cerveau et de fait, améliore le fonctionnement de notre mémoire, il n’y a qu’un pas… Un pas qu’il convient de ne pas franchir à la hâte car la science nous montre souvent qu’il faut rester prudent. A ce jour, les études qui se sont intéressées aux effets du jeûne sur les fonctions cognitives et la mémoire ne montrent pas d’effet. Pour autant, la notion de jeûne regroupe différentes pratiques (jeûne ponctuel, intermittent, plus ou moins prolongé…) qui n’induisent probablement pas les mêmes effets. Aussi cette variété de pratiques rend-elle probablement difficile l’étude de ces effets sur la mémoire ? A ces questions, de futures études contrôlant mieux la nature du jeûne mais aussi les caractéristiques des personnes qui le pratiquent devront apporter des éclaircissements.


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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