En 2012, l’Espace de Réflexion Ethique sur la Maladie d’Alzheimer (EREMA) avait interrogé les Français sur leur connaissance de la maladie d’Alzheimer et les implications perçues sur la vie quotidienne des patients et des proches qui les accompagnent.
En 2013, l’EREMA poursuit son exploration du rapport des Français à la maladie d’Alzheimer en les interrogeant sur le savoir précoce. A l’occasion de l’Université d’été « Alzheimer, éthique et société », qui se tiendra du 17 au 20 septembre 2013 sur le thème « Vouloir savoir : anticiper, diagnostiquer, mobiliser », l’EREMA et TNS Sofres ont réalisé une nouvelle étude auprès des Français en leur posant la question suivante : s’il existait un test fiable permettant de diagnostiquer la maladie d’Alzheimer plusieurs années avant l’apparition de tout symptôme, feriez-vous ce test ?
L’étude « Les Français et Alzheimer, vivre au quotidien avec la maladie » a été menée auprès de 2 001 Français âgés de 18 ans et plus interrogés online du 22 au 31 Juillet 2013. nous vous proposons ci-dessous ses principaux enseignements.
Alzheimer : Une maladie toujours très présente à l’esprit des Français
Un peu plus d’un quart de la population (27%) se dit concerné par la maladie d’Alzheimer, (soi-même touché, proche d’une personne touchée ou aidant une personne touchée par la maladie).
6 Français sur 10 environ estiment bien connaitre la maladie : 50% assez bien et 9% très bien. Il leur arrive d’y penser pour eux (52%) mais un peu plus pour leurs proches (60%).
Un réflexe marque la prégnance de la maladie : en cas de trous de mémoire, 62% des Français disent penser à la maladie d’Alzheimer. Pour la majeure partie (52%), c’est une « façon de parler » mais pour 10% de la population, cette pensée traduit une réelle inquiétude, en particulier pour les aidants (25%), c’est-à-dire les personnes qui soutiennent en ce moment une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer.
La quasi-totalité des Français seraient prêts à se faire diagnostiquer plusieurs années avant que n’apparaissent les symptômes
90% des Français interrogés se soumettraient à un test fiable permettant de diagnostiquer la maladie d’Alzheimer plusieurs années avant l’apparition de tout symptôme si ce test existait.
Ils sont quasiment aussi nombreux à dire qu’ils inciteraient leur conjoint ou leurs parents à faire ce test (respectivement 87% et 86%). En revanche, ils ont plus de difficultés à envisager ce test pour leurs enfants (même si une grande majorité – 72% – y serait favorable).
Cette volonté d’appréhender la maladie, avant que les premiers symptômes ne soient visibles, va se confirmer tout au long des échanges avec les interviewés : la part des Français prêts à faire ce test s’il existait, reste forte, même une fois rappelé qu’il n’existe pas de traitement permettant de guérir (80%).
Faire le test pour savoir (se rassurer…) et pour se préparer à l’arrivée possible de la maladie
Les raisons de faire le test sont assez clairement établies dans l’esprit des Français : avoir du temps et les capacités nécessaires pour se préparer, notamment anticiper son avenir, en cas de test positif (63%), et être rassuré en cas de test négatif (60%),
Verbatim issus de l’enquête Alzheimer
- « Je préfère voir la vérité en face et avoir le temps de préparer le moment où je serais à la charge de quelqu’un »
- « J’ai parfois des trous de mémoire et cette maladie me fait très peur quand je vois les effets qu’elle a sur les personnes »
Alzheimer : Ne pas faire le test pour éviter l’angoisse de la maladie
Quand on envisage les raisons de ne pas faire ce test, l’absence de traitement capable de guérir est bien sûr évoquée (32%). Mais ce qui est en premier lieu exprimé c’est la difficulté à vivre l’angoisse de la maladie (38%). Ressortent également l’impact sur ses proches (23%), et l’impact sur sa situation financière (24%) etc.
Au final, il y a plus d’avantages que d’inconvénients à faire le test pour plus de trois quarts des Français (78%). Les Français déjà concernés par la maladie, qu’ils soient aidants ou qu’ils aient un malade dans leur entourage, se distinguent par un comportement encore plus volontariste (94% feraient le test, 82% y voient plus d’avantages que d’inconvénients), motivés plus que la moyenne par le poids de leurs antécédents familiaux (ils sont 27% à citer cette raison pour expliquer pourquoi ils feraient ce test contre 7% dans l’ensemble de la population).
Que faire en cas de pré diagnostic ? Mettre en place un traitement médical mais aussi en parler avec précaution…
Pour 65% des Français (et même 82% qui vivent déjà en couple), il faudrait avant tout en parler à son conjoint, pour 64% à son médecin généraliste voire à un médecin spécialiste de la maladie (44%) et 45% à ses enfants.
Alzheimer : Certaines personnes ne devraient pas être mises au courant
En revanche, en dehors de cette sphère de proximité, la parole est bloquée. Pour 61% des Français, certaines personnes ne devraient pas être mises au courant. Ainsi 47% n’en parleraient pas à leurs collègues, 57% n’en parleraient pas à leur employeur, et 66% n’en parleraient pas à leur banquier. Et les patients aux premiers stades de la maladie ou leurs proches seraient peu sollicités.
Le temps alloué par l’annonce de la maladie avant que les symptômes n’apparaissent serait bien sûr consacré au traitement médical (88%)… mais les préoccupations financières (84%) et juridiques (82%) ne sont pas loin. Il est à noter à ce titre que les modalités juridiques concrètes qui s’offrent à eux sont très peu connues. On a pu entendre parler plus qu’on ne connait précisément les possibilités de désigner une personne de confiance (54%), rédiger des directives anticipées (42%) ou établir un mandat de protection futur (39%).
« Comme pour d’autres pathologies, nombre de personnes souhaitent anticiper une éventuelle maladie et disposer d’un diagnostic précoce. Qu’en sera-t-il demain lorsqu’il sera probablement possible d’annoncer à une personne que dans vingt ou trente ans, elle risque de développer la maladie d’Alzheimer ? Comment l’accompagner dans sa vie et l’aider à anticiper, si elle le souhaite, ses choix ? » déclare Emmanuel Hirsch, Directeur de l’Espace éthique Alzheimer.
Cet article a été publié par la Rédaction le