Catherine OLLIVET : Les nouvelles technologies, entre fantasmes et services rendus

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Par : Catherine OLLIVET
– Présidente de France Alzheimer 93 – Espace Ethique AP-HP –

Comme dans bien d’autres domaines, les nouvelles technologies mises au point pour aider les personnes handicapées, malades, âgées, ne sont ni bonnes ni mauvaises en elles-mêmes : tout dépend de l’usage qu’on en fait, c’est-à-dire de l’adéquation entre le besoin de la personne et la réponse proposée.

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Ainsi la web cam branchée sur l’ordinateur et le visio téléphone peuvent permettre à des grands parents de voir leurs petits enfants à l’autre bout de la France ou de la terre lorsqu’ils se parlent au téléphone…. Encore faut-il bien sûr que le grand père ou la grand-mère ne soit pas non voyant !
Récemment aussi, nous avons vu un homme entièrement paralysé et ne pouvant plus parler, équipé d’une caméra spéciale reliée à un ordinateur analysant et traduisant le seul mouvement de sa paupière, capable de rédiger une thèse et devenir chercheur au CNRS.

De même, le service rendu par un bracelet anti-disparition ne peut être adapté que si la personne malade est désorientée dans son environnement, qu’elle a la capacité et la volonté fréquente de partir sans but adapté (comme celui de retourner chez sa maman décédée depuis 20 ans)  ou qu’elle vit seule en inversant souvent le jour et la nuit avec un risque important d’errance nocturne, éventuellement en chemise de nuit au mois de Janvier. Encore faut-il aussi que l’aidant familial ou l’auxiliaire de vie soit formé à l’utiliser de façon adaptée, à savoir veiller à son rechargement, c’est-à-dire qu’il ne se retrouve pas devant un mode d’emploi sans personne à qui demander des explications.
Il ne viendrait à l’esprit de personne d’acheter une telle technologie pour une personne malade ne pouvant plus marcher. Mais il faut ne jamais avoir vécu la terrible angoisse de constater la disparition de son malade depuis un temps anormal et inquiétant, ne jamais avoir vécu l’enfer de le rechercher dans toutes les rues avoisinantes pendant qu’un autre membre de la famille, accroché au téléphone, appelle tous les services d’Urgence des hôpitaux proches et les commissariats ou gendarmeries, pour penser que « le besoin de sécurité des familles » est excessif ! Chaque année des familles vivent ce drame de retrouver leur proche malade désorienté plusieurs jours plus tard, ou malheureusement décédé.

Une autre nouvelle technologie peut également rendre un service important : il n’est pas rare, dans nos associations, de recevoir l’appel d’un conjoint de malade Alzheimer, lui-même malade, ayant par exemple déjà fait un accident cardiaque. Son inquiétude et celle de leurs enfants sont grandes car ils savent que si l’aidant fait un nouveau malaise et est inconscient, la personne malade d’Alzheimer sera incapable de réagir de façon adaptée et d’appeler de l’aide.
Un bracelet détecteur de malaise peut ainsi permettre d’identifier le problème de santé et de déclencher automatiquement les alertes prévues, médecin, enfants, permettant au couple de rester chez soi au lieu d’être contraint par leur double pathologie d’entrer en institution.
Mais une autre technologie peut aussi apporter une aide considérable, à domicile comme en institution, aux personnes atteintes de pathologies de type Alzheimer : celles-ci sont souvent très angoissées par la baisse de la luminosité en fin de journée, mais ne vont pas toujours avoir la réaction adaptée ….de tout simplement allumer une lumière alors même qu’elles peuvent se lever de leur fauteuil et marcher. Programmer selon l’horaire des saisons, l’allumage automatique de certaines lampes peut ainsi éviter les peurs et les chutes aussi dévastatrices les unes que les autres.

Dans un tout ordre d’idée, les japonais ont mis au point un ravissant bébé phoque, plus vrai que nature mais bourré de capteurs et de technologies diverses : lorsqu’on le caresse, il réagit, ses yeux brillent, il bouge la tête, se redresse en poussant de petits cris….
Avec notre logique bien française, la tentation est grande de balayer cela d’un «  c’est bon pour les japonais, mais pas pour nous ! »
Et pourtant, fondamentalement, il n’y a pas de différence entre les émotions d’un malade Alzheimer japonais ou français ! Lorsqu’on voit les réactions d’une personne malade en présence d’un chien par exemple, surtout à un stade avancé de la maladie, alors que ce sont justement les émotions qui prennent alors la plus grande place dans ses comportements, on mesure l’importance de cette relation avec un animal : le sourire qui revient, les yeux qui s’éclairent, les mains jusqu’alors inertes qui caressent et parfois même quelques mots, le prénom d’un chien aimé autrefois….
Malheureusement, pour de nombreuses raisons bonnes ou mauvaises, bien des personnes âgées en général, Alzheimer en particulier, ne peuvent plus garder leur animal de compagnie, soit parce qu’à domicile elles ne peuvent plus assurer sa vie quotidienne, soit parce que l’institution d’accueil refuse les animaux. Alors pourquoi pas, à condition d’en avoir les moyens financiers,  cette petite merveille de technologie, certainement pas aussi riche qu’un vrai chien, mais bien plus réactive qu’une peluche, pour faire naître et renaître les émotions sans lesquelles il n’y a plus de vie ?

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L’inquiétude légitime face aux gérontechnologies est de voir se développer une déshumanisation de l’accompagnement des personnes handicapées, âgées, vulnérables, parce que les professionnels de l’aide et du soin coûtent cher, au profit d’une « robotisation » de cet accompagnement : à quand le bras automatisé fixé à la tête du lit d’EHPAD,  se terminant par une « main recouverte façon peau » chargé de tenir la main de la personne âgée pendant qu’une boite vocale préenregistrée et  « personnalisée » par le cadre infirmier dira des mots doux pour l’aider à surmonter son angoisse de solitude…………le tout bien entendu toujours à la charge du budget hébergement payant par la personne malade et sa famille, puisqu’un robot et une boite vocale , c’est bien connu, ça ne soigne pas et donc ne peut être pris en charge par le budget soin ?


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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