Si le Syndicat national des audioprothésistes (Unsaf) se félicite du coup de projecteur mis sur la dédramatisation des difficultés d’audition, il s’interroge sur les effets du lancement par la société Afflelou d’une opération commerciale proposant « la seconde aide auditive pour 1 euro de plus ». Voire de sa légalité.
La société Afflelou a annoncé le 1er décembre la déclinaison de son offre Tchin Tchin dédiée à l’optique, à l’enseigne d’audioprothèse Alain Afflelou Acousticien. « On peut légitiment se réjouir du fait que M. Afflelou utilise sa notoriété pour « dédramatiser la perte d’audition » précise l’UNAF dans un communiqué, et de poursuivre « Le message visant à dépasser la stigmatisation de l’aide auditive et à démocratiser son usage est, en effet, une priorité partagée par tous les acteurs de l’audition. Cependant, on peut tout aussi légitimement s’interroger quant à la pertinence et la portée des messages véhiculés… »
La suite du Communiqué de presse de l’UNSAF :
UNAF : La presbyacousie, pour l’audition, n’est pas « le même phénomène » que la presbytie, pour la vue
Le parallèle que fait cette campagne de publicité avec le secteur de l’optique est source de confusion. Ce qui est vrai pour l’optique ne l’est pas nécessairement pour l’audioprothèse. La presbyacousie est la conséquence de la perte de cellules, de l’affaiblissement, de l’oreille interne. Elle ne peut être compensée à 100% par l’utilisation d’appareils. Elle nécessite non seulement le choix d’appareils adéquats, mais implique aussi nécessairement une adaptation ainsi qu’un suivi régulier, que seul est habilité à effectuer un audioprothésiste. »
Le succès de l’appareillage auditif repose avant tout sur le rôle de l’audioprothésiste. L’aide auditive est un dispositif médical personnalisé dont la base de remboursement par la Sécurité Sociale peut atteindre 1 400 euros par appareil pour certaines personnes. La presbytie, quant à elle, n’est qu’un simple trouble de la focalisation pour voir de près. La vision de loin, la qualité de la vision, ne sont pas atteintes. Contrairement aux aides auditives, les lunettes ne sont pas des dispositifs médicaux.
UNAF : 80% des porteurs d’aides auditives sont satisfaits
Cette campagne publicitaire met aussi l’accent sur la méconnaissance du public sur la malaudition. Qu’en est-il exactement ? Si des efforts restent encore à fournir pour sensibiliser le public à l’importance d’une bonne audition et pour dédramatiser l’utilisation d’appareils auditifs, les résultats de la récente étude EuroTrack France 2012 sont tout à fait encourageants. Ils vont à l’encontre des préjugés véhiculés sur le secteur.
D’après cette étude, 80% des porteurs d’aides auditives se déclarent globalement satisfaits. On y constate un impact très positif de l’équipement auditif sur la vie professionnelle et les revenus de leurs utilisateurs. Autres aspects positifs : meilleure communication générale avec la famille et les proches, amélioration de la vie sociale…
UNAF : Une campagne publicitaire mettant en avant une offre commerciale dont la légalité pose problème
Comment être dans le cadre légal de l’interdiction de la vente à perte avec « Tchin Tchin Audio : la seconde aide auditive pour un euro de plus, évidemment de même marque et de même valeur » ? L’appareil auditif seul, sans le prix global des prestations d’adaptation indissociables, a une valeur de plusieurs centaines d’euros…
Les malentendants, auront‐ils la même qualité de service pendant la durée de cette offre valable jusqu’au 30 juin 2013, et ensuite quand, à partir du 1er juillet, ils devront payer le double pour le même équipement ? La duplication de recettes commerciales issues de l’optique, datant du siècle dernier, est de nature à tromper les malentendants. En effet, leur satisfaction dépend en grande partie de la qualité des prestations indissociables de l’appareil. Cette campagne publicitaire gomme cet aspect « acteur–‐dépendant » et fait croire à la vente d’un simple bien de consommation.
Si M. Afflelou a construit sa fortune dans l’optique, Mme Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales et de la Santé, ne semble pas convaincue de l’efficience de son métier de base, puisqu’elle déclarait récemment : « le secteur des opticiens est trop concentré et ne permet donc pas d’avoir des prix accessibles », « (il) faut réguler le prix des lunettes ».
Cette forme de cynisme commercial visant à faire des affaires à n’importe quel prix inquiète l’UNSAF, car elle est totalement incompatible avec les impératifs de santé publique et d’exercice de la profession d’audioprothésiste. Le syndicat tient à rappeler ses principaux objectifs : une formation initiale et continue de qualité, un exercice rigoureux et respectueux de nos clients, des prestations transparentes, une réflexion menée avec les pouvoirs publics afin de limiter le reste à charge et d’améliorer l’accès aux soins.
« L’audioprothèse est un métier en tant que tel. », « Il faut même plus d’années d’études que pour être opticien. », « Moi je crois que c’est très dangereux d’être opticien et audioprothésiste ; on est l’un ou l’autre »4, notait Alain Afflelou pendant le Silmo, le salon de l’optique, en septembre 2009 à Paris. Nous partageons toujours son avis ! Journalistes, l’Unsaf se tient à votre disposition, pour répondre à toutes vos questions, pour toute information, documentation et/ou mise en relation avec des professionnels, audioprothésistes mais aussi médecins ORL.
Cet article a été publié par la Rédaction le
Merci de me contente