En attendant la 9ème édition de SilverNight, les Trophées SilverEco 2017, nous vous proposons de revenir sur les lauréats de la précédente édition.
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En 2016, l’association Mediagraph recevait le prix SilverEco de la Meilleure démarche associative. Retour sur le ressenti de Cécile Thomas, co-fondatrice de l’association Mediagraph.
SilverEco.fr : Quelle initiative avez-vous défendu lors de Silver Night ?
Cécile Thomas : Nous avons défendu le volet prise en main de la découverte des outils et des usages numériques de l’association Mediagraph, qui s’adresse au public des retraités nantais.
Lancée il y a vingt ans, cette initiative a pour vocation de proposer des ateliers d’initiation et de sensibiliser les seniors aux nouvelles technologies :
- prendre en main une tablette, un ordinateur, un smartphone,
- domestiquer les usages d’internet et de la messagerie,
- valoriser leurs photos numériques,
- numériser leur vie quotidienne.
Comment cela s’est mis en place ? A quels besoins souhaitiez-vous répondre à l’époque et comment votre démarche a-t-elle évolué ?
Au début, nous nous spécialisions vraiment dans la découverte d’internet, qui n’existait pas alors dans les foyers ; nous voulions montrer l’intérêt de payer, à l’époque, l’abonnement.
Nous aidons maintenant davantage au niveau de la prise en main de l’ordinateur, sur le choix de tel ou tel usage de l’ordinateur. Nous nous concentrons également beaucoup sur les tablettes, les smartphones, quelle application choisir, pour quel usage, etc. Nous sommes partis d’usages anciens pour évoluer vers des usages plus contemporains.
Est-ce-que vous avez constaté une évolution chez les seniors, dans l’utilisation qu’ils ont d’internet ? Est-ce qu’aujourd’hui ceux que vous suivez ont toujours les mêmes lacunes concernant internet et les nouvelles technologies ?
Maintenant, il y a des personnes qui viennent nous voir en disant : « J’ai acheté un smartphone, je ne sais pas comment l’utiliser, aidez-moi. » Mais aussi des personnes qui viennent toujours pour me dire « Je viens d’acheter un ordinateur, je ne sais pas m’en servir. Internet, ça sert à quoi ? » Autrement dit, les mêmes demandes qu’il y a vingt ans, mais aussi des demandes de personnes qui savent ce qu’est internet, qui savent ce qu’elles veulent, mais qui ne savent pas comment faire. Avant, les gens ne savaient pas ce qu’ils voulaient, il s’agissait davantage d’une sensibilisation d’usage.
Nos ateliers ne portent pas non plus sur les mêmes usages qu’avant : là où de nombreuses personnes voulaient des formations de prise en main d’internet, aujourd’hui, on a moins de débutants. Mais des questions se posent toujours quand il s’agit d’e-administration ou même d’e-business.
Peut-on dire que les jeunes générations sont plus dans leur élément concernant internet ?
Ce n’est pas si simple, il y a des retraités dont c’est vraiment l’élément, qui font pas mal de choses sur l’ordinateur, comme leur généalogie, par exemple. Certains passent même plus de temps sur internet que moi. Et on a aussi des jeunes filles de vingt ans qui ne savent pas se servir d’un ordinateur, ou seulement pour des usages très précis, et pas pour de l’e-administration. Ce n’est pas qu’une question d’âge.
Combien de personnes avez-vous aidé en vingt ans ?
L’année dernière, nous avons formé 280 retraités. Sur vingt ans, on peut multiplier par vingt… Et encore, il y a eu des années où c’était plus.
Est-ce-que vous connaissez les autres initiatives qui existent en France, comme par exemple le collectif Silver Geek ou la Clique des mamies connectées ?
Oui. Il y a aussi OldUp sur Paris. La différence est que ces associations fonctionnent, dans le cas de la Silver Geek, avec des volontaires et des fonds publics ; en ce qui concerne Old’Up et les mamies connectées, ce sont des bénévoles. Il n’y a pas de côté économique, alors que nos activités reposent sur deux emplois à temps plein. C’est pour ça que la Silver économie m’intéressait, parce qu’on est vraiment dans le système économique. De l’économie sociale et solidaire, certes, mais dans le champ économique.
Nous avons régulièrement des demandes de groupes équivalents au nôtre, qui sont en train de se créer ; nous pourrions les aider, mais nous ne sommes que deux salariés, donc c’est un peu difficile… Il nous faudrait des aides pour pouvoir monter d’autres actions du même type dans d’autres villes.
Qu’est-ce-que représente pour vous le fait d’avoir remporté ce trophée SilverEco ?
Une reconnaissance du travail effectué depuis vingt ans. Ce qui m’a intéressé, c’était de mettre en valeur des initiatives autour des retraités et des seniors. Au sein de l’économie locale, quand on parle de retraités, d’aînés, de cet accompagnement de retraités, on part tout de suite dans la gérontechnologie, dans quelque chose de très médical, mais rarement d’initiatives ludiques, d’apprentissage…
Une personne âgée m’a encore raconté que son médecin lui avait dit : « Faites des projets comme si vous aviez 45 ans, parce qu’il vous reste entre 25 et 26 années à vivre. »
Silver Night, c’est une reconnaissance d’un travail effectif qui n’est pas dégradante. Souvent, le travail auprès des seniors est dévalorisé, c’est ce que je ressens régulièrement, quand on me dit « Toi, tu fais les retraités. »
C’était votre fil conducteur, cette année : changer de regard ?
C’est tout à fait ça, changer le regard sur les retraités que l’on va devenir ; ou peut-être pas retraité, mais vieux (rire).
Comment s’est passé votre oral face au Jury des Trophées de la Silver économie ?
Cela nous a permis de synthétiser notre propos, de faire une photographie de nos actions. Le jury a été attentif et a posé des questions principalement sur le volet économique de nos activités.
Avez-vous des conseils à donner aux candidats des prochaines éditions de Silver Night ?
D’avoir un bon projet, qui ne soit pas du vent. Il faut y croire et tenter sa chance ; être pleinement engagé dans son projet et honnête, c’est le meilleur moyen d’y arriver.
Ce Trophée nous a permis d’avoir un nouveau regard sur nos actions, qui sont souvent dévalorisées sur le terrain ; on nous dit souvent « Cela ne touche que les vieux. » Et depuis, nous avons plusieurs pistes auprès de partenaires et autres acteurs économiques.
Cet article a été publié par la Rédaction le