Le jeudi 16 janvier, la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a présenté une stratégie globale pour prévenir la perte d’autonomie intitulée « Vieillir en bonne santé 2020-2022 » comprenant 18 mesures réparties en 4 axes.
Les chiffres-clés du vieillissement de la population et de la perte d’autonomie
Vieillir en bonne santé : Six mesures phares
Parmi les 18 mesures présentées par la ministre, on retient 6 mesures phares.
Pour provoquer des réflexes de prévention le plus tôt possible :
- Le lancement par Santé publique France d’une application en santé « avancer en âge en bonne santé », offrant une auto-évaluation de ses besoins, des conseils opérationnels et des orientations personnalisées pour une prévention renforcée à 40-45 ans, fin 2020.
- La montée en puissance d’une prévention renforcée au moment du passage à la retraite, avec 200 000 personnes reçues, par an, en rendez-vous de prévention d’ici 2022.
Pour préserver l’autonomie des personnes âgées fragiles :
- La diffusion d’un programme de dépistage des fragilités des personnes âgées selon la démarche ICOPE, conçue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à partir de territoires expérimentateurs avec un lancement en 2020.
Pour lutter contre l’isolement des aînés :
- La diffusion d’un label « Villes amies des aînés » pour mobiliser les territoires autour de l’enjeu de l’isolement social, dès 2020.
Pour prévenir la perte d’autonomie liée à l’hospitalisation des personnes âgées:
- Un investissement fort pour atteindre l’objectif « zéro passage par les urgences » pour les personnes âgées dépendantes d’ici 5 ans.
Pour diffuser dans tous les territoires les innovations les plus probantes pour prévenir la perte d’autonomie des aînés :
- La création d’un centre de ressources « prévention de la perte d’autonomie », le renforcement des instances départementales finançant la prévention.
L’ambition de la stratégie que nous présentons aujourd’hui, c’est d’abord de mettre en cohérence les initiatives très diverses autour d’objectifs communs ; c’est aussi de pousser des expérimentations, ou de généraliser les dispositifs qui ont fait leurs preuves.
Nous créons avec cette stratégie les conditions de la réussite d’une loi très ambitieuse sur le grand âge et l’autonomie, parce que cette stratégie de prévention rendra plus soutenable le « choc » démographique auquel notre pays sera confronté dès 2025. déclare Agnès Buzyn
La stratégie globale pour prévenir de la perte d’autonomie
Axe 1 : Promouvoir la prévention tout au long de la vie pour repousser la perte d’autonomie
Le besoin de changement
La bonne santé se construit tout au long de la vie. C’est tout le sens de l’ambition du Gouvernement en matière de prévention, et c’est pour cela que la France s’est dotée en 2018 d’un plan « priorité prévention » agissant sur tous les déterminants de santé. Cela va de l’obligation vaccinale protégeant de maladies infectieuses lourdement handicapantes ou mortelles à des actions de promotion de l’activité physique tout au long de la vie et y compris pendant la maladie.
La stratégie « Vieillir en bonne santé » s’inscrit dans la continuité de ces efforts en mettant un accent fort sur un message simple et essentiel : protéger sa santé grâce à la prévention, c’est protéger son autonomie à long terme.
Car la perte d’autonomie n’est pas liée à l’âge mais à une ou plusieurs maladies chroniques comme une maladie cardiovasculaire, un diabète, une obésité, une insuffisance respiratoire qui sont elles-mêmes liées à des déterminants de santé connus : tabac, alcool, nutrition inadaptée, activité physique insuffisante et comportement sédentaire. Les facteurs environnementaux impactant la santé font par ailleurs l’objet de recherches.
Pour faire passer ce message, la stratégie propose de nouvelles actions de communication et d’éducation à la santé, dans le cadre général de l’action du Gouvernement en matière de prévention. Elle propose aussi de renforcer les actions de prévention à deux moments-clés de la vie d’adulte : le passage des 40/45 ans et le passage à la retraite.
Les mesures
- Mesure 1 : le lancement par Santé publique France d’une application en santé « avancer en âge en bonne santé », offrant une auto-évaluation de ses besoins, des conseils opérationnels et des orientations personnalisées pour une prévention renforcée à 40-45 ans, fin 2020.
- Mesure 2 : la montée en puissance d’un rendez-vous prévention au moment du départ à la retraite, avec la contribution des caisses d’assurance maladie et de retraite (CNAM, CNAV, CCMSA, AGIRC-ARRCO), dès 2020.
- Mesure 3 : Une campagne annuelle de communication pour accompagner la Semaine bleue, consacrée chaque première semaine d’octobre à la prévention de la perte d’autonomie liée à l’âge. La semaine bleue inscrira, en 2020 le thème majeur de la nutrition comme déterminant de la prévention.
Axe 2 : Dès 70 ans, agir sur les facteurs accélérant la perte d’autonomie
Le besoin de changement
La préservation de l’autonomie à partir de 70 ans nécessite deux changements.
D’abord, la détection la plus précoce possible des fragilités, car ces dernières sont réversibles ou peuvent être compensées et n’entraînent pas automatiquement la perte d’autonomie.
Ensuite, une action renforcée sur les facteurs qui accélèrent la perte d’autonomie : les chutes, souvent liées à l’inadaptation des logements, les hospitalisations qui auraient pu être évitées, l’isolement, et les déficits sensoriels mal diagnostiqués, soignés ou compensés.
Les mesures
- Mesure 4 : l’expérimentation dans plusieurs régions d’un programme de dépistage de la fragilité selon la démarche ICOPE, conçue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), sur la période 2020-2022. Les résultats issus de ce programme de dépistage donneront lieu à des réponses concrètes comme par exemple la prescription d’activités physiques adaptées à la perte d’autonomie.
- Mesure 5 : le déploiement d’un moment réflexe rappelant la possibilité et le besoin de procéder à l’adaptation fonctionnelle des logements le plus tôt possible, en soutenant l’accès à des diagnostics logement gratuit ou à prix réduits, à partir de 2020.
- Mesure 6 : la diffusion massive, dès à présent, des offres de soutien à l’adaptation des logements pour les ménages modestes.
- Mesure 7 : un investissement fort pour atteindre l’objectif « zéro passage par les urgences » pour les personnes âgées dépendantes d’ici 5 ans.
- Mesure 8 : Un appui aux les initiatives locales permettant de se mobiliser pour les aînés afin de lutter contre l’isolement social. Cet appui pourra être financier ou une contribution à l’ingénierie des projets, afin d’accompagner les territoires. La diffusion d’un label « Villes amies des aînés » et la mobilisation des jeunes du service national universel et du service civique viendront enrichir ces actions dès 2020.
- Mesure 9 : une campagne de communication en 2020 et 2021 pour mobiliser le 100% santé, notamment pour l’accès aux lunettes et aux prothèses auditives.
- Mesure 10 : l’expérimentation d’un autotest de dépistage du déficit auditif pour le grand public et les professionnels de soins primaires, sous forme d’une application, dès 2020.
- Mesure 11 : la définition de repères pour le dépistage des troubles de la vision associés au vieillissement (presbytie, glaucome, cataracte, DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge) et l’orientation vers un spécialiste, en 2021
- Mesure 12 : l’adaptation aux personnes âgées de VigilanS, dispositif de prévention du suicide, dès 2020.
Axe 3 : Mettre la préservation de l’autonomie de chaque personne au coeur des priorités des professionnels
Le besoin de changement
Dans la période récente, nombre d’actions ont déjà été engagées pour favoriser le « réflexe prévention » des professionnels de santé en direction des aînés, par exemple : une réforme de la tarification de l’activité des infirmiers libéraux pour favoriser l’accompagnement des personnes âgées, un forfait pour valoriser le suivi de patients de plus de 80 ans par les médecins traitants, une rémunération des médecins généralistes liées à des objectifs de vaccination antigrippale et de prescription de médicaments pour les personnes âgées.
Les bilans partagés de médication, établis entre des patients âgés polymédiqués et leurs pharmaciens d’officine, afin d’assurer un suivi de leur consommation médicamenteuse et lutter contre la iatrogénie, sont également des outils qui s’inscrivent dans cet objectif. Leur déploiement va être encouragé et ils seront ainsi, dès 2020, proposés à tous les patients dès 65 ans ainsi, à titre expérimental, qu’aux résidents en EHPAD.
La stratégie « Avancer en âge en bonne santé » poursuit cet effort avec pour objectif de placer la prévention au coeur des priorités de tous les professionnels de la santé et du grand âge, et en mettant l’accent sur les établissements de santé et les EHPAD.
Les mesures
- Mesure 13 : l’introduction de critères de prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées dans la certification des établissements de santé, en 2020.
- Mesure 14 : la prise en compte, dans les systèmes de tarification des services d’urgences des établissements de santé, des bonnes pratiques visant à favoriser la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées dépendantes, en 2021.
- Mesure 15 : le déploiement d’actions de prévention dans les EHPAD, financées à hauteur de 15M€ par an.
- Mesure 16 : la diffusion d’outils d’information et de dialogue entre médecins et patients pour promouvoir la dé-prescription des médicaments, à partir de 2020.
Axe 4 : Mettre la France au niveau des pays européens les plus avancés en matière de prévention de la perte d’autonomie, par la recherche et l’innovation
Le besoin de changement
Parmi les axes majeurs de recherche dans lesquels notre pays doit investir dans les années à venir figurent les questions du bien vieillir et de la prévention de la perte d’autonomie, elles-mêmes fortement liées aux maladies chroniques.
Cet enjeu relève d’un programme national de recherche, qui associera la recherche fondamentale sur les mécanismes du vieillissement ou les pathologies liées à l’âge, la recherche technologique au service de la médecine régénérative, de la médecine connectée, de la robotique, et jusqu’à la recherche en sciences humaines et sociales.
Les mesures
- Mesure 17 : la constitution et le suivi d’un ensemble cohérent d’indicateurs nous permettant d’évaluer l’impact des actions de prévention en direction des personnes âgées, dès 2020. En particulier, un indicateur de prévalence de la fragilité sera élaboré par Santé Publique France.
- Mesure 18 : la mobilisation du Programme d’investissement d’avenir (PIA), mis en place par l’État pour financer des investissements innovants et prometteurs sur le territoire, pour investir dans la recherche sur le vieillissement et la prévention de la perte d’autonomie.
Des leviers pour favoriser la mobilisation de toute la société pour mieux-vieillir
Quatre leviers ont été proposés afin de mobiliser l’intégralité de la société autour de cette thématique grâce à des impulsions communes et une expertise partagée.
Levier 1
Pour mobiliser toujours plus au niveau local et favoriser la coopération de tous les acteurs, renforcer le pilotage et la visibilité des conférences des financeurs par la définition d’orientations nationales en 2020. Ces conférences sont chargées de promouvoir des actions de prévention en direction des personnes en perte d’autonomie vivant à domicile ou accompagnées en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
Levier 2
Afin de mesurer l’impact des actions mises en oeuvre par les conférences des financeurs et promouvoir les actions les plus efficaces pour lutter contre la perte d’autonomie, créer un centre de ressources en 2020. Il sera constitué d’experts reconnus dans le champ de la perte d’autonomie issus des secteurs de santé, des entreprises, etc.
Levier 3
Afin de faire de la prévention de la perte d’autonomie liée à l’âge un enjeu central de la Stratégie du Grand âge, inscrire cette priorité à l’ordre du jour du prochain Comité Interministériel de Santé et renforcer le niveau d’niveau d’information du Parlement à l’occasion de l’examen de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Levier 4
Pour susciter l’innovation partout sur le territoire, lancer un tour de France de la Silver economy dans toutes les régions afin d’organiser la mobilisation des acteurs institutionnels (Chambres de commerce et d’industrie, collectivités locales, etc.) et économiques (entreprises, porteurs de projets, etc.) intervenant dans le champ de la perte d’autonomie.
« Le bonheur supprime la vieillesse » écrivait Kafka. J’en déduis donc que le malheur l’accroît ou, à tout le moins, accélère tout ce qui fait qu’on peut craindre et redouter le vieillissement. confie Agnès Buzyn
Cet article a été publié par la Rédaction le