À l’occasion de la Journée Nationale des Aidants, L’OCIRP à organisé un colloque à la Maison de la Radio sur le thème : « Salariés aidants : comment les aider ? » et pour aller plus loin, l’OCIRP et VIAVOICE ont lancé l’Observatoire des salariés aidants.
Pourquoi un Observatoire des salariés aidants ?
Les proches aidants (non professionnels) d’une personne âgée ou en situation de handicap sont 8 à 11 millions en France. 61 % d’entre elles et d’entre eux travaillent.
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Palais des Festivals de Cannes / 16 et 17 Septembre 2024
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Evènement réservé aux professionnels – nombre de places limité
Ces proches aidants en activité sont confrontés à des problèmes de santé physique et psychologique accrus et à des difficultés pour concilier leurs vies personnelle et professionnelle. Leur santé, leur qualité de vie au travail et leurs performances (productivité, absentéisme, présentéisme) peuvent être affectées. La situation de celles et ceux qui aident et travaillent devient une question de société et une préoccupation croissante pour le monde du travail : salariés aidants et non aidants, entreprises, branches professionnelles, organisations syndicales et patronales.
Aujourd’hui, les salariés proches aidants représentent 15 % de la population active (INSEE). 1 actif sur 4 sera proche aidant en 2030.
Quelques dispositifs existent déjà, créés par la loi, les branches professionnelles, les entreprises et les acteurs de la protection sociale. Ils seront probablement insuffisants face à la transition démographique que nous vivons (le nombre de personnes en perte d’autonomie va doubler entre 2013 et 2060, selon l’INED et la DREES).
Comment les entreprises, les branches professionnelles, peuvent-elles mieux aider les salariés aidants ?
Pour répondre à cette question, l’OCIRP, union d’institutions de prévoyance à gestion paritaire, a lancé l’Observatoire OCIRP Salariés aidants et mené avec VIAVOICE une enquête sur le thème : « Salariés aidants et dialogue social ».
Accompagné par des experts, l’Observatoire a interrogé 3 352 salariés pour mieux connaître leurs attentes et a ensuite demandé aux partenaires sociaux (organisations syndicales et organisations patronales) de réagir à cette enquête et d’indiquer comment les entreprises et les branches professionnelles peuvent mieux aider les salariés aidants.
A propos de la Méthodologie de l’enquête menée par l’OCIRP et VIAVOICE
Les travaux menés par Viavoice et l’OCIRP ont été conçus en 3 phases complémentaires
- Phase 1 : La réalisation d’une enquête qualitative destinée à recueillir les perceptions et analyses de 30 personnalités expertes ou concernées par la problématique, de manière à dresser un état des lieux précis de la situation de l’aidance dans l’entreprise. Cette démarche, exploratoire, a été réalisée en amont de l’étude quantitative de manière à dégager les axes incontournables à partir desquels la phase 2, quantitative, devait être construite.
- Phase 2 : La réalisation d’une grande enquête quantitative auprès de 3352 salariés du secteur privé dont 1000 salariés aidants à double-vocation : classification des formes d’aidance et mise au point d’un indice du bien-être des aidants. Cette deuxième phase a été construite à partir des enseignements de la phase qualitative, et notamment de celui mettant en avant l’hétérogénéité des situations d’aidance. L’enquête identifie 4 familles-types d’aidants et mesure l’impact de l’engagement de l’entreprise sur leur bien-être.
- Phase 3 : Des entretiens avec 50 représentants des partenaires sociaux (organisations syndicales et organisations patronales, à parité) pour recueillir leur réaction à 6 grands enseignements de l’enquête auprès des salariés et leur vision du soutien aux salariés aidants
Phase 1 :
Enquête exploratoire auprès d’experts de la question des proches aidants pour clarifier les enjeux
37 entretiens avec des experts et acteurs (DRH, acteurs de la protection sociale, du dialogue social, de la Silver économie, acteurs associatifs, chercheurs. Cette phase exploratoire a révélé une vision convergente de la situation des proches aidants, notamment de celles et ceux qui sont en activité :
L’urgence de la situation. La crise COVID a accentué la charge pesant sur les aidants et a servi de révélateur. La question des proches aidants est une «bombe à retardement», liée à la transition démographique (vieillissement accéléré de la population, papy-boom), aux charges croissantes, dans les années à venir, pesant sur les proches aidants (charges financières, temps passé, impacts physiques et psychologiques …), alors qu’ils ont d’autres obligations (éducatives et professionnelles notamment).
La question des proches aidants émerge mais est encore mise à distance : le sujet reste encore impensé, y compris par les aidants eux-mêmes (manque d’information, déni, réticences à se déclarer à son employeur…).
Les limites de l’État Providence : malgré les réformes, les charges financières et le reste à charge pesant sur les familles vont s’alourdir.
Le besoin de financement : l’État et la Sécurité sociale ne pourront pas tout prendre en charge. Dans le monde de l’entreprise, seuls les grands groupes sont en mesure de proposer un réel soutien (information, services, soutien financier…) aux salariés proches aidants.
Phase 2 :
Les salariés aidants et l’entreprise
Étude quantitative
Une enquête centrée sur la place des salariés aidants dans l’entreprise
Interviews effectuées en ligne du 11 au 21 juin 2021 auprès d’un échantillon de 3352 salariés du secteur privé, représentatif de la population des salariés du privé français.
Ont été extraits de cet échantillon 1 000 salariés en situation de proche aidant. La représentativité est assurée par la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : sexe, âge, profession, région et secteur d’activité.
Les Chiffres clés
Le quotidien des salariés aidants :
• Moyenne d’âge d’entrée dans l’aidance : 39 ans
• Temps d’aide par semaine : 8,3 heures
• 81% des salariés aidants ont le sentiment de manquer de temps dans leur vie
Les salariés aidants ont besoin d’aide
• 79% d’entre eux estiment qu’un accès facilité à des aides professionnelles supplémentaires pourrait les soulager
La difficulté à concilier rôle d’aidant/vie personnelle/vie professionnelle
• 51% ont déjà renoncé à une opportunité dans leur vie familiale en raison de leur situation d’aidant
• 50% ont renoncé à une opportunité dans leur vie sociale
• Près de 4 salariés aidants sur 10 ont renoncé à une opportunité professionnelle
La réalité des salariés aidants dans l’entreprise
• La dénomination de «salarié proche aidant» est encore peu connue, même par les personnes concernées : 3 salariés aidants sur 10 ne savent pas de quoi il s’agit
• 48% ont le sentiment de pouvoir perdre leur emploi
• 40% se sentent mis en difficulté au niveau professionnel
• Seulement 26% des salariés aidants ont informé leur employeur de leur situation
• Un fort déficit d’information : 81% des salariés non-aidants se déclarent «pas assez informés» (sur leurs droits, sur les démarches…)
C’est aussi le cas de 65% des salariés aidants
Les attentes des salariés aidants pour améliorer leur situation de travail
• Des congés par intermittence pour gérer un imprévu (35%)
• Des congés proches aidants mieux rémunérés (34%)
• Des moyens financiers (34%)
• Un aménagement horaire, une flexibilité horaire (33%)
• Des informations sur vos droits, les dispositifs proposés (32%)
Qui est légitime pour m’aider en tant que salarié aidant ?
La protection sociale est jugée aussi légitime que la famille.
• La Sécurité sociale et la protection sociale complémentaire (institutions de prévoyance, mutuelles, assurances) arrivent en tête avec 51% de réponses favorables, au même niveau que la famille
• Viennent ensuite la sphère publique (collectivités territoriales : 47% ; État : 44%), les associations : 43%
L’indice de bien-être des salariés aidants (IBEA®)
L’indice est de 5,52 / 10
Cet indice (IBEA) est calculé à partir des résultats concernant différentes questions de la phase quantitative. L’indice est la moyenne des notes attribuées à chaque question qui constituent des indicateurs à suivre dans le temps.
Il existe 12 indicateurs (12 questions) à partir desquels l’indice est construit et calculé.
Cet indice permettra de mesurer l’évolution du bien-être des salariés aidants.
Ces indicateurs sont les suivants :
✓ La conciliation des vies professionnelles et personnelles ;
✓ Les opportunités de progression de carrière ;
✓ L’écoute et le soutien par les collègues ;
✓ L’écoute et le soutien par les supérieurs ;
✓ L’écoute et le soutien par les politiques de l’entreprise ;
✓ La motivation au travail ;
✓ L’état de santé physique ;
✓ L’état de santé psychologique ;
✓ Les outils, services et dispositifs mis en place par l’entreprise ;
✓ L’engagement de l’entreprise en faveur des salariés aidants ;
✓ Le niveau d’information délivré par l’entreprise sur les salariés aidants ;
✓ Le rapport au déni/à la méconnaissance de sa propre situation d’aidant ;
L’indice du bien-être des salariés aidants est très sensible au soutien perçu en provenance de l’entreprise.
La typologie des salariés aidants
Il n’y a pas un-e aidant-e type, mais plusieurs types d’aidants.
Une typologie des aidants a ainsi été élaborée par Viavoice et l’OCIRP, de manière à illustrer la pluralité des situations d’aidance : un traitement statistique a permis de croiser les réponses aux différentes questions de la phase quantitative de manière à identifier et formuler 4 grandes familles de répondants et donc d’aidants.
Ces quatre familles ont été structurées autour de deux axes permettant de mettre en rapport la charge de l’aide et le soutien perçu en provenance de l’entreprise.
Cette classification se structure comme suit :
- Les salariés aidants autonomes : une intensité d’aidance peu élevée qui génère peu d’attentes envers l’entreprise. Ce type d’aidant se sent autonome par rapport à son entreprise.
- Les salariés aidants accompagnés : une intensité d’aidance très élevée mais une inclusion dans l’entreprise importante. Ce type d’aidant se sent accompagné par son entreprise.
- Les salariés aidants vulnérables : une intensité d’aidance peu importante (mais potentiellement à venir) et une absence de soutien de l’entreprise déjà perçue. Ce type d’aidant se sent en demande vis-à-vis de son entreprise.
- Les salariés aidants désemparés : une intensité d’aidance très élevée amplifiée par une absence de soutien de l’entreprise. Ce type d’aidant se sent abandonné par son entreprise
Phase 3 :
Salariés aidants : le point de vue des partenaires sociaux (organisations syndicales et patronales)
Les partenaires sociaux jouent un rôle au quotidien auprès des salariés proches aidants et ont un pouvoir de décision à travers les négociations collectives dans les branches professionnelles ou les entreprsises. L’Observatoire OCIRP salariés aidants a recueilli leur réaction aux résultats de l’enquête menée auprès des salariés.
50 représentants des partenaires sociaux ont été interrogés : 25 organisations syndicales et 25 organisations patronales.
Rappel du contexte : Les entreprises et les partenaires sociaux sont concernés par le sujet des salariés aidants. La situation de proche aidant impacte la santé, la qualité de vie au travail des salariés, leur disponibilité (arrêts de travail, absentéisme ou présentéisme, c’est-à-dire le fait d’être présent à son poste mais d’avoir l’esprit occupé ailleurs…), leur motivation, leur productivité. Dans l’intérêt des salariés, mais aussi des entreprises, vaut-il mieux ignorer le sujet (ce qui peut entraîner des coûts cachés, des solutions informelles) ou le prendre en compte ?
Comment agir (aménagement des horaires, congés, répit, information, indemnisation de congés, autres soutiens financiers, services…) ?
Les points de consensus entre les partenaires sociaux sur la question des salariés aidants
Le soutien aux salariés aidants : un sujet d’avenir, qui fait l’objet d’une prise de conscience : les partenaires sociaux sont unanimes, c’est un sujet collectif qui nous engage tous ainsi que l’acteur que constitue l’entreprise.
Le soutien aux salariés aidants (information, outils et dispositifs disponibles) est un levier de performance pour l’entreprise pour 74% des responsables interrogés. La logique du «gagnant-gagnant» est donc plébiscitée.
Les solutions consensuelles :
• Répondre en priorité au besoin d’information des salariés et des entreprises ;
• Permettre une flexibilité du temps et de l’organisation du travail et rendre possible le répit de l’aidant sont des leviers intégrés par de nombreuses entreprises ;
• Mieux indemniser les congés.
La pertinence d’une négociation dans les branches et dans les entreprises
• Consensus sur la pertinence d’un cadre clair et lisible face à la réticence de certains salariés aidants à déclarer leur situation ;
• 86% jugent que les branches professionnelles sont un niveau pertinent pour traiter la question des salariés aidants ;
• La négociation doit se faire en parallèle (ou successivement) dans les branches professionnelles et dans les entreprises pour 58% des personnes interrogées.
• Les branches disposent d’un atout de cohérence et de puissance de négociation.
• Les entreprises disposent de l’atout de proximité et de la possibilité de prendre en compte les contraintes économiques
Les questionnements sur l’engagement des entreprises et des branches professionnelles
• L’obligation de négocier dans les branches professionnelles doit s’accompagner d’une volonté partagée d’aboutir à des accords et à des dispositifs efficaces ;
• Le sujet du niveau de négociation (branche et/ou entreprise) interroge les partenaires sociaux, notamment les organisations patronales, sur la capacité d’action des entreprises sur ce sujet et ses marges de manœuvre : créer un cadre commun pour éviter les disparités entre grandes et petites entreprises est utile, mais plusieurs interlocuteurs soulignent qu’il faut dans le même temps s’adapter aux contraintes économiques des petites structures ;
• Des réserves sont émises sur la capacité effectives des entreprises à prendre en charge le sujet. L’enjeu du financement est déterminant
Cet article a été publié par la Rédaction le