L’intelligence artificielle au service du maintien à domicile : le fonds de dotation ABILITIS dévoile un livre blanc et présente des propositions

AUTRES ACTUS ET INFORMATIONS SUR : AUTONOMIE & DEPENDANCE

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Le fonds de dotation ABILITIS (anciennement fonds Handicap & Société), qui milite pour améliorer les conditions de vie et l’inclusion dans la société des personnes vulnérables, vient de dévoiler un livre blanc intitulé « IA et maintien à domicile : réalité ou fiction ? ».

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Réalisée avec le soutien de la mutuelle Intégrance, du Groupe APICIL et de CORELIA, et en partenariat avec l’institut Viavoice, cette étude interroge les promesses de l’intelligence artificielle face au défi du maintien à domicile des personnes en situation de perte d’autonomie, qu’elle résulte d’un handicap ou de l’avancée en âge. Ce livre blanc est composé de trois volets complémentaires : un sondage réalisé auprès d’un panel de Français, une série d’entretiens avec des experts de l’innovation et du médico-social invités à réagir à la suite des résultats ainsi que des propositions concrètes formulées par ABILITIS pour que l’intelligence artificielle réponde aux besoins des plus vulnérables.

Perte d’autonomie et maintien à domicile : quel regard portent les Français sur le sujet ?

Les résultats du sondage mené par Viavoice en novembre 2024 apportent tout d’abord un éclairage nouveau sur le rapport qu’entretiennent les Français avec la perte d’autonomie et le maintien à domicile grâce aux services à la personne.

Près de 2/3 des Français se sentent concernés de près ou de loin par la perte d’autonomie (63%), quand 30% ont un proche en situation de dépendance qui bénéficie déjà de services à domicile. Si elle ne concerne pas uniquement les personnes âgées, la question du maintien à domicile va toutefois se faire plus prégnante encore du fait du vieillissement de la population. À titre d’exemple, 65% des répondants préfèreraient vivre à domicile en bénéficiant de services à la personne en cas de perte d’autonomie, contre 23% dans une résidence adaptée aux seniors. Or, avec près de 20 millions de personnes âgées prévues en France d’ici 2050 et un secteur professionnel qui connaît des difficultés de recrutement, ces aspirations posent un défi sociétal majeur.

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Les Français se montrent pourtant sur la réserve lorsqu’on leur demande si les services à la personne dont bénéficient leurs proches qui vivent à domicile sont adaptés. Plus de deux sondés sur trois expriment même des craintes quant au niveau global de l’aide apportée que ce soit sur le plan médical, du soutien moral et psychologique ou de l’accompagnement administratif (76%). Un soutien humain qui apparaît d’autant plus problématique qu’une part significative des répondants (72%) déclare que leurs proches souffrent souvent voire très souvent de solitude. « Ces données montrent que, malgré les efforts des auxiliaires de vie en la matière, leur rôle est encore perçu comme étant utilitaire », regrette Franck Nataf, Président de la Fédération des Services à la Personne et de Proximité (FEDESAP), « L’IA pourrait permettre de gagner du temps sur certains aspects de l’accompagnement pour approfondir le lien humain ».

Le recours à l’intelligence artificielle dans le secteur du médico-social : entre promesses et risque de se heurter aux craintes des Français

Parmi les bénéfices attendus de l’IA dans le secteur, l’allègement du quotidien du corps médico-social relève effectivement d’une attente forte, comme le souligne Julien Paynaut, directeur général du Groupe Handéo : « Une IA peut soulager rapidement les soignants en automatisant certaines tâches à faible valeur ajoutée. Les professionnels, plutôt que de réaliser constamment des mesures de santé ou gérer des emplois du temps de plus en plus complexes, pourraient se concentrer sur l’humain ».

Le recours à l’intelligence artificielle comme appui logistique et technique pour le maintien à domicile emporte également l’adhésion des répondants :

  • 87% seraient favorables à la mise en place de dispositifs de surveillance de chute basés sur l’intelligence artificielle pour alerter automatiquement les secours chez des personnes en situation de perte d’autonomie et vivant seules ;
  • 76% soutiennent également la possibilité d’avoir recours à des outils de mesure connectés (poids, tension…) permettant de signaler les mesures inquiétantes au corps médical et un Français sur deux considère que l’intelligence artificielle pourrait le faire aussi bien qu’un être humain.

Au-delà du préventif, certaines innovations pourraient permettre de renforcer la médecine prédictive. Un enjeu sur lequel s’est positionné Alexandre Petit, Président du Gérontopôle Nouvelle-Aquitaine et fondateur d’ALOGIA Groupe : « L’IA est une véritable opportunité, notamment dans la prédiction. En intervenant dès le début de la chaîne, nous croisons et analysons les données pour identifier les profils les plus à risque, leurs besoins prioritaires et anticiper les situations critiques ».

Un constat sur lequel les sondés se montrent encore prudents : 57% estiment que l’IA permettrait d’améliorer le suivi des personnes en perte d’autonomie, mais qu’elle risque dans le même temps de les isoler davantage en diminuant leurs interactions sociales avec le personnel. Isabelle Hartvig, experte usagers engagée auprès des personnes âgées, alerte justement : «Aujourd’hui, en France, il y a seulement 6 accompagnants pour 10 personnes âgées, contre 12 pour 10 dans les pays scandinaves. Cette pénurie de main-d’œuvre montre que l’IA doit être un complément, sans toutefois devenir un substitut ».

Une prudence sur le rôle que doit jouer l’IA dans la lutte contre la perte d’autonomie qui s’explique par le rapport ambivalent qu’entretiennent les Français avec cette innovation. S’ils lui reconnaissent certains bénéfices, elle génère des inquiétudes et notamment en matière d’impact sur les interactions sociales (80%) et sur la confidentialité des données (79%). Plus d’un sondé sur deux considère que l’IA apporte plus de risques que de bénéfices (56%).

Pour Sébastien Vermandel, responsable Veille et Conseil chez APF TechLab, le premier obstacle à l’adoption de l’IA est l’absence de sensibilisation sur le sujet, combinée à un imaginaire souvent négatif : « Ce contexte produit une vision fondée sur la peur et la défiance. Et à plus forte raison encore dans un secteur comme la perte d’autonomie où la relation humaine est centrale ». À titre d’exemple, 14% des Français seulement se sentent suffisamment informés sur son impact potentiel sur le plan éthique, et la moitié (54%), ne sait pas qu’un texte de loi encadre son usage.

Face aux promesses de l’IA et aux attentes des acteurs du secteur, un travail de pédagogie est donc nécessaire pour promouvoir un autre discours sur le sujet et lever les doutes des Français. « Nous devons définir le rôle de l’IA et interroger notre rapport aux technologies et à l’innovation », résume Jamal Mekhaemar, Directeur technique et innovation de CORELIA, « L’IA pourrait très clairement contribuer à améliorer l’accompagnement des personnes en situation de vulnérabilité, un objectif qui fait consensus, mais nous devons travailler à renforcer l’acceptabilité de ces solutions, pas les imposer aux professionnels et aux Français ».

Les propositions du fonds de dotation ABILITIS pour faire de l’IA un levier accessible et éthique au service des plus vulnérables

Engagé au service des personnes en situation de perte d’autonomie, le fonds de dotation ABILITIS émet donc 6 propositions pour transformer l’IA en un levier stratégique national, à la fois accessible et éthique, qui répond aux besoins des plus vulnérables.

Donner une place de choix au handicap et à la perte d’autonomie dans la stratégie nationale pour l’IA, notamment en lançant un appel à projets axé sur le handicap et la perte d’autonomie, similaire à celui lancé pour le secteur culturel. ABILITIS recommande également la création d’un fonds public pour financer les initiatives liées à l’IA et au maintien à domicile des personnes vulnérables et la mise en place d’une gouvernance interministérielle dédiée afin de coordonner les dispositifs.

Sensibiliser et former le public, tant pour réduire les craintes que pour développer les connaissances qui seront nécessaires au déploiement de l’IA dans le secteur des services à la personne. ABILITIS appelle donc à la mise en place de programmes éducatifs labellisés par l’État, à la diffusion de campagnes nationales de sensibilisation et à la création de modules spécifiques intégrés dans les formations sanitaires et médico-sociales.

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Encourager l’usage éthique de l’IA en posant un cadre réglementaire conforme aux dispositions de l’IA Act dont l’entrée en application est prévue pour le 2 août 2026.

Lutter contre la fracture numérique des personnes vulnérables en améliorant l’accessibilité et l’utilisation des services en ligne, en facilitant l’accès aux équipements informatiques et à Internet et en instaurant des services d’accompagnement personnalisé auprès des plus vulnérables.

Innover, évaluer et concevoir des solutions inclusives en rassemblant les synergies. Le fonds de dotation ABILITIS propose de développer des « Maisons de l’intelligence artificielle » dans chaque région, sur le modèle de la Maison intelligente de Blagnac. Ces plateformes permettront de stimuler l’innovation, à la manière d’un incubateur, et de recenser les bonnes pratiques, en France et dans les pays en pointe sur les questions d’accompagnement des publics en perte d’autonomie.

Développer des solutions hybrides pour garantir que l’IA soit au service d’un meilleur accompagnement des personnes en situation de perte d’autonomie. Sur ce point, le livre blanc d’ABILITIS a mis en lumière la nécessité d’associer l’IA aux personnes humaines pour en tirer le meilleur tout en réduisant le risque d’isolement social.

« L’intelligence artificielle promet des avancées technologiques majeures mais soulève de nombreux défis et interrogations comme le révèlent les résultats du sondage », pose Stéphane Bridel, le Directeur général du fonds de dotation ABILITIS, qui estime que : « Face aux enjeux liés à la perte d’autonomie, résultant notamment du vieillissement de la population, et aux problématiques de recrutement dans les secteurs du soin et de l’accompagnement, nous ne pouvons pas faire l’impasse de cet allié de choix pour le maintien à domicile. Cependant, il nous faut garantir que l’utilisation de l’IA se fera dans un cadre éthique et accessible, au service des plus vulnérables ».

Télécharger le livre blanc Abilitis : « L’intelligence artificielle au service du maintien à domicile »


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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