Le sénateur de Côte-d’Or réagissait aux conclusions de la mission commune d’information sur la dépendance et la création d’un cinquième risque. Pour lui le sort des départements ruraux et des aînés est lié. Mettre en synergie ces deux éléments apporterait de bons résultats.
» Je me permets donc de revenir sur 2 aspects liant d’aménagement du territoire et financement de la dépendance :
1. localiser les EHPAD en zone rural, car on diminue le reste-à-charge en diminuant la part du foncier dans le coût de la prise en charge.
2. faire preuve de prudence dans le recours sur succession, car une telle option, comme il en existe pour ASPA, fera peser le financement de la dépendance sur les départements vieillissant.
• 1. La diminution du reste-à-charge par l’installation d’EHPAD sur des territoires à faible pression foncière, c’est donc une dépendance moins chère et une meilleure valorisation des territoires ruraux.
Oui, il est légitime de mobiliser la solidarité nationale, alors que nombre de familles ne peuvent plus supporter le reste-à-charge. De fait, même en matière de dépendance, les cordons de la bourse ne sont pas élastiques. Pour proposer aux Français une réforme juste et audacieuse, il est indispensable de développer une vision compréhensive du sujet, tant sur les plans sociétal et médical, qu’économique et territorial. En réalité, les dimensions économique et territoriale sont précisément liées, alors que, à ce jour, une conception trop administrative tend bien souvent à les opposer.
On ne pourra redonner vie à nos aînés sans redonner vie à nos territoires. Au regard des 30 % que représente le foncier dans le coût d’une place en maison médicalisée, la ruralité offre une opportunité sans pareil pour pourvoir la France de nouveaux établissements, à meilleur rapport qualité/prix de surcroît. Il faudrait cependant sortir des schèmes traditionnels des CROSS, SROS, DASS, DRASS, et des AGS maintenant, qui concentrent les projets dans les centres urbains, au nom de la proximité familiale.
Malheureusement, la proximité familiale est un argument bien théorique au regard de la réalité de la dépendance. Non seulement, les EHPAD placés zone urbaine coûtent extrêmement cher et le reste-à-charge des familles reste trop élevé ; en outre, ces structures ne trouvent pas pour autant leur place dans une vie urbaine à la fois absorbante et anonyme.
Oui, le foncier est trop cher en ville ; Non, les plus modestes sont privés d’accès à ces structures d’accompagnement. Oui, la ville est absorbante ; Non, les familles actives n’ont pas davantage le temps de visiter leurs aînés en cours de semaine. Oui, la ville est anonyme ; Non, cet anonymat ne nous permettra pas de réduire de risque de maltraitance.
La ruralité offre, osons le dire, un cadre de vie mieux adapté pour traiter la dépendance. La ruralité laisse le temps au temps ; elle laisse aussi à chacun l’espace suffisant pour respirer. Le sommeil y est meilleur et la vie plus équilibrée. Moins d’obstacles encombrent les promenades. Et surtout, à la campagne, il n’y a point d’anonymat ; nul n’est oublié de la société. Lorsqu’un aîné n’ouvre plus ses volets un beau matin, on n’attend pas deux semaines pour prendre des nouvelles.
Alors que la dépendance est difficile à accepter, tant pour les aînés que pour leurs proches, la vie à la campagne commence par redonner une dignité à chacun. Favoriser un cadre de vie plus humain, permettra notamment de diminuer le sentiment de culpabilité des familles ; mieux vivre en EHPAD pour ne plus faire des placement en EHPAD des commencements d’abandon.
Redonner vie à nos aînés en redonnant vie à nos territoires, telle peut être l’ambition d’une prise en charge nationale de la dépendance. Oui, l’angoisse de la dépendance, c’est la peur de la chute dont on ne peut se relever. Si la crainte de la dépendance est réelle, une chute en appelle néanmoins une autre que nous emprunterons à La Fontaine : « A dieu donc ! fi du plaisir que la crainte peut corrompre » arguerait ainsi le rat des champs. Alors, loin du tracas que posent les villes, ne faut-il pas rechercher la quiétude des campagnes ?
• 2. Faire preuve de prudence dans les recours sur succession, car une telle option, comme il en existe pour ASPA, fera peser le financement de la dépendance sur les départements vieillissant.
En effet, on constate qu’à travers des mécanismes comme l’ASPA, les aides accordées aux personnes âgées sont, in fine, répercutées sur des biens immobiliers, généralement situés dans des départements vieillissants.
On peut alors légitimement redouter, que la multiplication de biens à vendre dans ces territoires, ne fasse qu’accélérer leur déclin en faussant le marché à la baisse. Or la baisse du marché aura elle-même pour conséquence de diminuer les recettes de conseils généraux.
Avant que ces mécanismes ne soient généralisés ou étendus, je crois que la question de l’équité territoriale devrait faire l’objet d’expertises, de modélisations. Il faut donc faire preuve de prudence sur le recours sur succession.
Pour conclure brièvement, je tenais donc à souligner les impacts que peuvent avoir sur l’aménagement des territoires, les modalités de financement que nous retiendrons pour le financement de la dépendance. Je crois que c’est bien « l’esprit de la maison » que d’en tenir compte.
Je vous remercie. »
Cet article a été publié par la Rédaction le