Étude du Lab Autonomia sur l’amour et la vieillesse : entre besoin fondamental et protection imposée

AUTRES ACTUS ET INFORMATIONS SUR : FAITS DE SOCIETE

Partager cet article

A quelques jours de la Saint-Valentin, le Lab Autonomia, centre de ressources et de recherche dédié au vieillissement du groupe Oui Care, dévoile les résultats d’une étude réalisée par l’institut becoming sur les sentiments et les réalisations qui comptent quand on avance en âge. L’enquête montre les avis contrastés des Français qui, tout en envisageant un champ des possibles très riche en vieillissant, fait de rêve accompli et de vie sexuelle épanouie, placent la sécurité et le besoin de protection des aînés au-dessus des libertés individuelles. Entre l’amour et la vieillesse, l’autonomie et la protection, comment trouver le juste équilibre ?

L’amour et la vieillesse : Une notion essentielle pour bien vieillir 

logo lab autonomia - étude sur l'amour et la vieillesse

L’amour reste un besoin fondamental tout au long de la vie. D’après cette étude, les Français considèrent que l’amour de la famille et des enfants joue un rôle central dans la vie des 60 ans et plus, devant celui du partenaire. Pour les personnes âgées elles-mêmes, c’est l’amour du partenaire qui prime.

  • 44 % des Français pensent que l’amour des enfants et de la famille est le sentiment le plus important pour les personnes âgées, pour bien vivre
  • 31 % pensent que l’amour du partenaire de vie se place en principal
  • 15 % jugent que le sentiment d’être protégé, en sécurité, est le plus important, devant l’amour d’un compagnon ou de sa famille
  • Pour seulement 4 % des personnes interrogées, c’est l’amitié qui prime, devant les autres sentiments 
l'amour et la vieillesse - une lab autonomia

Rien de vraiment surprenant à ce que l’amour des proches apparaisse comme le besoin prioritaire des personnes âgées pour bien vivre. C’est quelque chose que l’on pourrait retrouver à tous les âges de la vie. Néanmoins, l’étude montre que l’amour qui compte le plus pour une personne âgée n’est pas tout à fait le même selon l’âge des répondants. L’amour et la vieillesse sont donc liés de manière différente en fonction des étapes de la vie.

  • Les 18-24 ans placent clairement, “l’amour des enfants et de la famille” avant “l’amour d’un compagnon ou d’une compagne” (respectivement 56 % et 20 % d’entre eux).
  • Alors que les personnes plus âgées (60 ans et plus) sont moins nombreuses à citer en premier lieu “l’amour des enfants et de la famille” (37 %) que “l’amour d’un compagnon ou d’une compagne (39 %)”.

Véronique Cayado est docteure en psychologie et responsable d’étude au Lab Autonomia. Centre d’expertise scientifique autour des sujets liés à l’avancée en âge, le Lab Autonomia se donne pour mission d’accompagner les publics, en fournissant des ressources scientifiques sur le vieillissement avancé, qu’il s’agisse de connaissances générales ou de savoirs plus spécialisés sur la prévention, la bientraitance ou encore les effets de l’âgisme. Pour Véronique Cayado, ce décalage dit quelque chose de nos représentations de la vieillesse : 

On voit qu’après l’amour des proches (la famille puis le partenaire), c’est le besoin de protection et de sécurité qui est cité par l’ensemble des Français comme le type d’attention dont ont le plus besoin les personnes âgées pour bien vivre. Autrement dit, les formes de sociabilités qui sont plus éloignées de la sphère familiale, comme les relations amicales, sont perçues comme secondaires par rapport au besoin de protection et de sécurité. Même l’amour de son animal de compagnie est jugé plus important que la reconnaissance de sa place dans la Cité ! Tout cela donne à voir finalement la représentation profonde des personnes âgées qui est la nôtre dans la société : des êtres humains à part, sur lesquels nous devons veiller, comme si leur état de faiblesse leur retirait leur statut de citoyen à part entière.

Véronique Cayado, docteure en psychologie et responsable d’étude au Lab Autonomia

Sécurité vs liberté individuelle : les Français choisissent à 80 % la sécurité pour leurs aînés 

L’étude met en lumière une donnée marquante sur la forte conviction de l’ensemble des Français quant à la nécessité de protéger les personnes âgées : 8 Français sur 10 pensent que les proches ou la société doivent protéger les personnes âgées, même si cela va à l’encontre de leur volonté ou de leurs préférences personnelles. Parmi ces 8 Français sur 10, près de la moitié le pensent même tout à fait. 

l'amour et la vieillesse

Une croyance plus forte chez les moins de 30 ans (87 %), mais tout de même bien partagée par les seniors eux-mêmes (à 74 %). Les CSP supérieures et les personnes habitant seules présenteraient, comme les plus âgés, un avis légèrement plus modéré sur le sujet (respectivement 71% et 76%). 

Une vie sociale, entrepreneuriale, associative, sentimentale, sexuelle, qui peut rester active, même passé 60 ans 

Les générations s’accordent à dire que les seniors peuvent toujours faire de nouvelles rencontres (ils sont 97 % à le penser), tomber amoureux (93 %), et même avoir une vie sexuelle épanouie, après 65 ans : ils sont 87 % à le penser. Au-delà de l’amour, les Français considèrent que les seniors peuvent mener une vie active et riche, qu’il s’agisse de leur engagement social, associatif ou même entrepreneurial. Ils peuvent continuer à s’épanouir dans tous les domaines et sont 93 % à penser qu’une personne âgée peut encore réaliser ses rêves. 

l'amour et la vieillesse - lab autonomia

Ces pourcentages montrent un consensus marqué sur le fait que les personnes âgées peuvent encore faire beaucoup de choses. On est loin ici de l’image de la vieillesse “déclin” caractérisée par l’état de dépendance qui pèserait sur le collectif. Le contraste avec les résultats précédents est saisissant. 

Saisissant mais compréhensible selon Véronique Cayado :

Il existe des représentations contraires de l’avancée en âge qui cohabitent dans un même espace social. Ainsi, entre l’image du senior actif et bien portant et celle du vieux dément dépendant, il y a un grand écart qui laisse de la place à la complexité de nos représentations. Cela étant dit, il existe aussi une forme d’auto-censure à décrier ouvertement les capacités d’action des plus vieux, qui se rapprocherait du biais de désirabilité sociale. Cela, aussi, pourrait expliquer le contraste de ces chiffres avec les autres résultats de l’enquête. Je retiens de cette étude la force de l’âgisme bienveillant, celui qui nous paraît tellement conforme à la morale qu’il passe sans problème l’auto-censure de la conscience. Cet âgisme bienveillant, ce sont toutes ces attitudes paternalistes, condescendantes et infantilisantes à l’égard des personnes plus âgées qui les placent si souvent en position de citoyens de seconde zone.

Véronique Cayado


Partager cet article

Cet article a été publié par la Rédaction le

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *