Selon l’estimation réalisée par notre association en 2018 (Enquête Ifop-JNA), 16 millions de Français étaient concernés par les acouphènes dont 4 à 7 millions de manière permanente. Une méta-analyse publiée en 2022 dans la revue scientifique JAMA Neurol, indiquait que 740 millions de personnes seraient concernées dans le monde dont 120 millions avec une forme sévère. Cette étude révélait aussi que les enfants étaient concernés.
10 ans après la première campagne nationale consacrée à l’information et l’alerte sur ces symptômes, les experts de l’association JNA, en association avec France Acouphènes, tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme. Ces symptômes ne sont toujours par reconnus parmi les handicaps invisibles invalidants malgré leurs effets délétères sur la santé des personnes concernées et l’impact des pratiques d’expositions sonores. Rien n’est mis en place pour enrayer le phénomène. Quelles incidences ?
Au niveau sanitaire
Par méconnaissance générale sur l’existence et les réalités de ces symptômes, les personnes concernées par ces bruits entendus par elles seules dans leur tête, ne consultent pas, n’en parlent pas à leur médecin traitant qui peut-être lui aussi démuni. Si à ce jour, des réseaux pluridisciplinaires de prise en charge se sont constitués au sein des services ORL des centres hospitaliers, leur existence reste méconnue du grand public.
Parmi les causes de survenue peuvent se cacher des pathologies de l’oreille interne, une surdité, des atteintes liées à des traumatismes sonores, des chocs traumatiques, des suites de médications, des chocs émotionnels… Sans consultation médicale, ces causes ne sont pas explorées et les facteurs de comorbités ne sont pas considérés dans le tableau général de santé du patient.
Lorsque non associés à une pathologie ou surdité, les accompagnements liés à réduire la gêne des acouphènes restent à la charge des personnes.
A l’occasion de cette édition, l’association JNA mobilise une grande chaîne humaine constituée des professionnels de l’audition et de la santé pour réaliser une campagne d’information mais aussi de repérage des acouphènes et des troubles de l’audition. Les « remontées du terrain » seront communiquées à la fin du mois de mars. Les relais officiels « locaux » seront accessibles sur le site de la campagne.
Au niveau social
Pour la personne elle-même, c’est l’ensemble des cercles relationnels qui est impacté. En fonction de leur intensité, les acouphènes peuvent se révéler envahissants. Ils destabilisent l’état émotionnel, rendent irritable et peuvent enfermer le patient dans une souffrance amenant à des formes sévères de dépression.
En fonction de l’intensité et de la durée de la gêne, les relations sociales personnelles et professionnelles sont dégradées. Les trajectoires sociales sont modifiées. Les possibilités d’être accompagné pour réduire la gêne dépendent des revenus des personnes, créant ainsi une inéquité dans l’accès aux soins.
Au travail, les médecins du travail, les ressources humaines, les référents mission handicap, les managers, les collègues sont démunis.
Au niveau sociétal. Il n’existe pas, de fait, de dispositif d’accompagnement des personnes en souffrance d’acouphènes. Il n’existe pas de statut de personne porteuse de handicap invisible. La société ne peut être résiliante face aux fragilités induites, comme si elles étaient inexistantes. Un déni.
Le caractère anthropique (dû aux activités humaines) est de plus en plus prégnant dans la survenue des acouphènes et amène à craindre un risque sanitaire élevé. Les jeunes sont aussi concernés dont les enfants de moins de 10 ans qui commencent à prendre l’habitude d’écoute du son avec des casques ou écouteurs.
Des campagnes de prévention primaire menées par les pouvoirs publics aideraient à enrayer la tendance. Un nouveau baromètre sera réalisé avec l’Institut Ifop en complément des enquêtes grands publics réalisées en 2014 et 2018. Les résultats seront présentés lors de la conférence de lancement de la campagne, le mardi 12 mars 2024.
Au niveau économie de santé publique
A ce jour, le fardeau économique n’est pas mesuré. Afin de le rendre visible, l’association JNA et l’association de patients France Acouphènes ont initié l’étude scientifique PESA (Etude du poids social et économique des Acouphènes). Le questionnaire a été défini par un comité d’experts scientifiques et médicaux. Il a reçu l’accord de la commission de la protection des personnes au sein de l’AP-HP.
L’étude PESA
- Révélera les coûts directs et indirects
- Analysera l’impact de l’historicité de ces symptômes sur ces coûts.
L’étude PESA apportera les arguments pour la reconnaissance de ces symptômes parmi les handicaps invisibles invalidants. Elle repose sur un questionnaire qui a été défini avec un comité scientifique composé d’experts scientifiques et médicaux. Son écho auprès des pouvoirs publics dépendra du nombre de personnes ayant renseigné le questionnaire. Pour accéder au questionnaire et répondre (gratuitement) : cliquer ici
Les résultats seront présentés lors de la conférence de lancement de la campagne, le mardi 12 mars 2024. Chaque année, c’est plus de 2 500 acteurs de la santé et de la prévention qui se mobilisent sur le territoire pour informer, sensibiliser, mobiliser. Ensemble, il s’agira de faire entendre la cause des acouphènes pour une meilleure santé de tous et partout.
Cet article a été publié par la Rédaction le