La Haute Autorité de Santé publie un guide pour améliorer la coordination des soins dans le domaine de la santé mentale.
Dans la prise en charge des patients souffrant de troubles mentaux, la coordination entre les médecins généralistes et les autres acteurs de soins (psychiatres, psychologues, infirmiers, etc.) est insuffisamment développée. Pour promouvoir une évolution des pratiques, la HAS publie un guide proposant différents outils ; les professionnels peuvent les mobiliser isolément ou combiner les uns avec les autres en fonction de leurs besoins, de leurs contraintes et du niveau de développement de la coordination sur leur territoire d’exercice.
Une coordination insuffisante entre généraliste et spécialistes
Le médecin généraliste est un acteur majeur de la prise en charge des troubles mentaux. Il participe à la détection et au traitement des troubles et accompagne les patients dans le cadre d’une prise en charge globale.
Or, on constate en France une coordination insuffisante entre le médecin généraliste et les professionnels spécialisés en psychiatrie et santé mentale notamment. Cette situation peut aboutir à des ruptures de soins, susceptibles d’avoir des conséquences importantes pour le patient, tant sur le plan de sa santé mentale que de sa santé physique. Aussi, depuis plusieurs années, les professionnels de santé, les patients et leurs proches, ainsi que des sociétés savantes, se sont emparés de ce sujet. Leur investissement a abouti à la publication d’une charte de partenariat, de recommandations et à la conduite de nombreuses expériences de coordination. S’inscrivant dans cette dynamique et souhaitant la conforter, la HAS a réalisé un état des lieux des expériences menées en France et à l’étranger. Ce travail de recensement n’a pas permis d’identifier une solution unique pour parvenir à une coordination interprofessionnelle optimale garantissant aux patients une prise en charge de qualité. Il a vocation à motiver les professionnels de santé en mettant à leur disposition des informations sur les initiatives de leurs confrères dont ils peuvent s’inspirer de façon pratique pour développer ou conforter une culture interprofessionnelle sur un territoire donné, cette culture interprofessionnelle reposant également sur la connaissance, la reconnaissance et le respect des différents acteurs entre eux.
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Des repères et des outils à combiner
A partir de l’état des lieux des expériences conduites, pour aider les professionnels à mieux se coordonner, la HAS publie une série de repères et d’outils utiles à l’atteinte de 3 objectifs opérationnels :
- Identifier les ressources disponibles (professionnels, établissements, dispositifs)
Une coordination interprofessionnelle suppose de connaitre les acteurs susceptibles d’être impliqués autour du patient. De nombreux annuaires et répertoires sont disponibles et des rencontres pluriprofessionnelles (staffs cliniques, groupes d’analyse de pratiques, etc.) sont un levier essentiel pour que les professionnels se connaissent, échangent et se construisent un réseau. - Echanger les informations utiles avec les autres acteurs de la prise en charge
L’échange et le partage d’informations, moins fréquents dans le champ de la psychiatrie et de la santé mentale, sont nécessaires à une prise en charge coordonnée et de qualité. Avec l’accord du patient et dans le respect du secret professionnel, un travail peut être conduit en vue de les améliorer. Différents outils de communication peuvent être mobilisés (messageries sécurisées, dossiers partagés, etc.) pour les faciliter et une attention doit être portée aux lettres de liaison ville-hôpital, obligatoires. - Etre en capacité d’accéder à des conseils de confrères, d’adresser un patient à un professionnel spécialisé en psychiatrie et santé mentale ou à un médecin généraliste et d’assurer un suivi conjoint
II est primordial que le médecin généraliste puisse joindre et échanger facilement avec un psychiatre et inversement. Cela peut par exemple être garanti par une ligne téléphonique dédiée au médecin généraliste, lui permettant d’obtenir des conseils pour une prise en charge ou une orientation vers les soins spécialisés.
De nombreux outils complémentaires sont également présentés dans le guide. Les professionnels sont invités à initier une réflexion sur le sujet de la coordination et à se saisir de ces outils en fonction de leurs besoins, de leurs contraintes et des spécificités de leur territoire respectif. Cette démarche doit s’appuyer sur un socle de valeurs partagées (reconnaissance du patient comme acteur de sa prise en charge, volonté d’établir des relations de confiance entre les différents acteurs pour favoriser l’alliance thérapeutique avec le patient…).
Enfin, si la motivation des professionnels est nécessaire pour que la coordination fonctionne, la HAS souligne l’importance d’une réflexion et d’une impulsion à différents échelons territoriaux (territoire de proximité, secteur de psychiatrie, département, région, etc.). Une implication et un appui des ARS sont à cet effet primordiaux. Les projets territoriaux de santé mentale (PTSM), dont le projet « Ma Santé 2022 » énonce l’obligation de mise en œuvre d’ici juillet 2020, devraient faciliter le développement de cette coordination. Ils devraient concourir à l’organisation du lien entre la psychiatrie, les soins de premier recours via le réseau territorial de proximité porté par les CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé) et les hôpitaux de proximité.
Programme de travail « psychiatrie et santé mentale » 2018-2023
La HAS est arrivée au terme de son premier programme pluriannuel « psychiatrie et santé mentale », engagé en 2013. Elle en assure la continuité par un nouveau programme pour la période 2018-2023. Il a été élaboré avec les différents acteurs concernés (représentants de professionnels, d’institutionnels, de fédérations et d’usagers), à partir des saisines institutionnelles et après consultation des membres du comité de suivi dédié de la HAS.
Un programme organisé autour de trois thèmes
Le programme de travail « psychiatrie et santé mentale » 2018-2023 est organisé autour de trois thèmes :
- « Droits et sécurité en psychiatrie » :
Des travaux seront conduits par exemple en vue d’améliorer la prise en charge des patients en programmes de soins (soins sans consentement en dehors de l’hospitalisation complète) et de mieux évaluer et prendre en charge le psychotraumatisme chez l’enfant et chez l’adulte. - « Troubles mentaux sévères et persistants et handicap psychique » :
Des travaux dédiés aux secteurs social et médico-social ainsi que des travaux à l’interface des secteurs sanitaire, social et médico-social seront conduits : réduction des risques et des dommages liés aux addictions dans les établissements sociaux et médico-sociaux, évaluation cognitive et soins de réhabilitation psychosociale… Ces travaux ancrent ainsi de façon concrète l’intégration de l’ANESM (Agence nationale des services et établissements sociaux et médico-sociaux) au sein de la HAS.
- « Pédopsychiatrie » :
Les travaux porteront notamment sur la prévention, le diagnostic et la prise en charge des troubles psychiques périnatals, la coordination entre les services de protection de l’enfance et les services de pédopsychiatrie, la continuité de la prise en charge entre services de pédopsychiatrie et services de psychiatrie adulte ainsi que la prévention et la prise en charge des tentatives de suicide chez l’enfant et l’adolescent.
Ce programme pluriannuel est évolutif et pourra notamment être actualisé en fonction des nouvelles saisines institutionnelles, d’une évolution des besoins des acteurs de terrain et des résultats des études de faisabilité.
En complément, la psychiatrie et la santé mentale seront spécifiquement abordées à l’occasion des travaux transversaux de la HAS, avec le développement de nouveaux indicateurs de qualité et de sécurité des soins dans ce champ et à l’occasion d’un focus spécifique dans le cadre de la future certification des établissements de santé.
Cet article a été publié par la Rédaction le