Gérontechnologies et éthique : le débat

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Jérôme PELISSIER (écrivain, chercheur en psycho-gérontologie, auteur de « La guerre des âges » – mars 2007, Armand-Colin), dans un article qu’il a récemment publié sur son blog jerpel.fr pose les bases d’une réflexion sur l’Ethique et les Gérontechnologies : le débat est ouvert…
Préambule

Il existe des différences radicales, extrêmes, entre les différents discours et représentations portant sur les technologies utilisées dans le champ du handicap et de la gérontologie. Chacun d’entre nous est ainsi susceptible de passer, parfois en quelques minutes, de la conviction que les gérontechnologies vont positivement révolutionner le prendre-soin des personnes âgées malades et/ou handicapées à la crainte de les voir nous priver peu à peu de notre liberté, attenter à notre intimité, voire conduire au chômage les professionnels.

Face à l’ensemble de ces représentations, un seul court article ne suffira pas. Aussi avons-nous fait ici le choix, plutôt que de tenter l’impossible exhaustivité, de lancer sur ce sujet des (géron)technologies et de l’éthique, quelques pistes de réflexions. Au lecteur de les poursuivre…

Usage des technologies et normes sociales

La tentation est toujours grande, lorsqu’on aborde le sujet des (géron)technologies, de tenter de résoudre certaines questions liées à la technologie elle-même (par exemple, l’usage de caméras dans les parties communes d’un EHPAD) indépendamment de la société dans laquelle se situe cette technologie et les personnes qui l’utilisent.

L’une des premières responsabilités des professionnels, qu’ils travaillent en établissement ou à domicile, est d’accepter, bon gré mal gré, les normes et usages de la société dans laquelle ils vivent et dans laquelle vivent, quelle que soit leur situation, les personnes dont ils prennent soin. Autrement dit, indépendamment des questions – éthiques notamment – que peuvent poser certaines pratiques, il nous semble que l’on doit défendre que l’usage ou le non-usage de ces pratiques en gérontologie doit refléter celui de la société en son ensemble. Bref, si un EHPAD, par exemple, refusait demain d’user d’une technologie (caméras dans les parties communes) alors que la majorité des écoles, administrations, immeubles, quartiers, parkings, magasins, hôtels, etc., en étaient équipés, nous aurions un décalage inquiétant – et ce quel que soit ce que nous pensons de l’usage de cette technologie.

À chaque fois qu’une technologie présente dans notre société, dans nos appartements ou maisons (par exemple, la sonnette à la porte d’entrée), semble absente dans les établissements où vivent des personnes âgées malades et/ou handicapées, nous devrions nous interroger : cette absence est-elle liée à la situation des personnes hébergées ou à de vieilles habitudes non réinterrogées ? Pourquoi, si les personnes sont chez elles dans leur chambre de maison de retraite, n’y a-t-il pas des sonnettes comme il y en a lorsqu’elles vivent chez elles à domicile.

Vigilance également, bien sûr, pour la situation inverse, dès lors qu’un établissement utiliserait une technologie que la majorité d’entre nous craignent ou refusent. Il faut alors que cet usage, nous y reviendrons, soit justifié par les caractéristiques particulières des personnes hébergées, par ce qu’il permet (accroissement de la sécurité, amélioration de la santé, etc.) et ne puisse être rempli par une technique socialement mieux acceptée. Aucune raison en effet, nous en conviendrons, que des techniques socialement refusées soient imposées aux vieux citoyens malades et/ou handicapées.

Questionnements

Au delà de ce principe important de reflet des normes sociales, quels questionnements éthiques peuvent-ils nous permettre, concrètement, de nous guider dans la jungle de ces technologies qui envahissent de plus en plus nos professions ? Existe-t-il des critères éthiques spécifiques pour l’usage de ces technologies ? Comment les juger profitables ou dangereuses ? Quels garde-fous peut-on placer pour leur utilisation ?


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Cet article a été publié par la Rédaction le

3 réflexions sur “Gérontechnologies et éthique : le débat”

  1. Il ne faut pas perdre de vue que les questions d’éthique et même l’éthique en général rest relative à une culture, à une société. Ethique vient du grec ethos qui signifie moeurs. Les gérontechnologies, leur création et leur utilisation restent relatives à nos us et coutumes.
    Si l’on veut une véritable éthique dans les gérontechnologies, il faut donc dans un premier temps les utiliser en fonction de ce que nous désirons et non pas utilser les technologies parcequ’elles sont disponibles.
    Par exemple, le robot parot développé par les japonais est probablement acceptable dans leur culture, mais plus difficilement dans la nôtre. Ces derniers peuvent donc parfaitement équiper leurs maisons de retraite de ces technologies et en faire par là un usage éthique, en revanche cet outil utilisé en France serait probablement moins bien reçu.

    Un des premiers garde fou consiste donc en une enquête établissant ce que nous attendons de ces technologies. Or il me semble que l’on attend d’elles une aide à la personne, mais qui ne vienne pas se substituer à l’aide humaine et à l’aide animale. Chacune de ces aides a sa spécificité, l’aide humaine est avant tout une aide sociale qui répond non seulement à des besoins de soins biologiques, mais surtout à un besoin de contact humain. Souvent des appels par téléalarme ou téléassistance sont simplement dûes à des besoins relationels.

    Il faut donc bien délimiter le rôle des différentes aides en fonction de notre culture. Sans pour autant tomber dans l’opposition caricatural entre l’homme et la machine, ainsi que le remplacement de l’homme par la machine.
    Une étude des besoins est donc de première imortance. Que désirons nous de ces technologies est le premier garde-fou qu’il faut poser à leur utilisation.
    Celui-ci diffère quelque peu du consentement qui demande une adoption passive des gérontechnologies laissant finalement une moins grande liberté qu’une véritable volition. C’est dans cet acte de vouloir envers ces outils plus que dans l’acceptation que l’on sera au plus juste de l’éthique.

  2. J’ai découvert ces solutions de localisation GPS pour personnes âgées.
    Traitera-t-on demain nos grands parents comme des prisonniers à domicile ?!
    Nos faits et gestes sont déjà surveillés dans la rue par la
    vidéosurveillance, je tiens à ce qu’il me reste de liberté pour mes
    vieux jours!
    Fabrice.

  3. Attention à ne pas imaginer les gérontechnologies comme autre chose qu’une aide à la personne.
    Imaginez une personne ayant un Alzheimer à un stade avancé, une personne qui fait réguliérement des fugues. Sans système de géolocalisation, elle devra être enfermée dans un périmètre restreint (par exemple, sa chambre de maison de retraite, ou sa maison etc.). Elle devra être surveillée, sans quoi en cas d’une nouvelle fugue pendant laquelle elle subirait des dommages, les personnes responsables porraient être attaqués pour négligence.
    La géolocalisation permet alors d’élargir le périmètre d’action de ce malade, inutil de le cloisonner quelque part, puisqu’on peut savoir où il est, on lui laisse une plus grande liberté d’aller.

    Enfin, rassurez-vous Fabrice, La localisation n’est pas pour les personnes âgées, mais pour les personnes souffrants de ce qu’on appel « démence ». Il n’est bien sûr absolument pas question de transformer les personnes âgées en prisonniers sous haute surveillance.
    lionel

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