L’Autorité de la Concurrence a autorisé, le 21 février 2014, la prise de contrôle de Medica par Korian.
La réalisation définitive de l’opération, qui n’est plus désormais soumise qu’à l’approbation des actionnaires des deux groupes, est donc toute proche et interviendra selon le calendrier prévu.
En se rapprochant dans le cadre d’une fusion amicale, Korian et Medica vont donner naissance au leader européen des services aux seniors pour devenir incontournable sur ce marché en forte croissance, qui représente aujourd’hui un enjeu majeur.
Cet article rédigé par Sophie de SENILHES et Solène ROCHE-BRUGERE est proposé par le cabinet d’avocats CaraKters
Korian-Medica : un projet de rapprochement ambitieux …
« Nous allons donner naissance au leader des services aux personnes âgées en Europe » a déclaré en Yann Coléou, directeur général de Korian appelé à diriger la nouvelle entité, dans un entretien à l’AFP en novembre 2013.
Le nouveau groupe, qui rassemblera 600 établissements avec une capacité de 57.000 lits et dont le chiffre d’affaires cumulé approchera les 2,2 milliards d’euros, se veut mieux armé pour renforcer et étendre sa couverture géographique, plus puissant pour saisir les opportunités de croissance et plus diversifié pour mieux gérer les évolutions réglementaires.
Ce rapprochement, pronostiqué depuis deux ans déjà, s’inscrit dans le mouvement de concentration du secteur des maisons de retraite, amorcé en 2011 par la fusion Dolcéa et DomusVi1, respectivement numéros 3 et 5 du marché, encore très morcelé mais sur lequel les acteurs français sont fortement positionnés.
Porté par un potentiel de croissance exceptionnel
L’offre étant bien inférieure à la demande2, les perspectives de croissance organiques du nouveau groupe, garanties par le vieillissement de la population en Europe, sont assez exceptionnelles et relativement imperméables aux aléas économiques.
En France, un habitant sur trois serait âgé de 60 ans ou plus en 2050 contre un sur cinq en 2005, selon les projections de l’Insee et les plus de 85 ans devraient représenter 5,4 millions de personnes en 2060 (soit quatre fois plus qu’aujourd’hui). L’on prévoit également un doublement de la population européenne des personnes âgées à l’horizon 2050.
A cette donnée démographique s’ajoute la nécessité de renouveler le parc existant et de le remettre aux normes. Si les personnes âgées entrent de plus en plus tard en maison de retraite (aux alentours de 85 ans en moyenne), elles sont plus lourdement dépendantes et demandent d’avantage de soins.
Or, dans un contexte de restrictions budgétaires de plus en plus fortes sur le domaine de la santé, le secteur public et associatif, qui représente actuellement les trois quarts de l’offre, risque d’avoir du mal à financer les investissements nécessaires à combler le manque de structures d’accueil et leur indispensable remise aux normes.
Toutes les opportunités sont donc ouvertes aux groupes privés, notamment dans la perspective d’une nouvelle loi sur l’organisation générale du vieillissement, comportant un volet spécifique sur la prise en charge de la dépendance.
Une technique juridique qui préserve la capacité financière du groupe
Le recours à la technique de la fusion-acquisition, qui est l’une des modalités juridiques de prise de contrôle d’une entreprise par une autre, consiste à réunir deux sociétés en une seule, l’une (Korian en l’occurrence) absorbant l’autre (Medica) qui disparait après avoir transmis à l’absorbante l’intégralité de son patrimoine, permet de préserver la capacité financière du nouveau groupe.
En effet, contrairement à une acquisition classique qui impliquerait le paiement d’un prix aux actionnaires de Medica (Medica est valorisée, dans le cadre de cette opération à 1,1 milliard d’euros), l’apport du patrimoine de Medica sera rémunéré par l’attribution d’actions Korian émises dans le cadre d’une augmentation de capital réservée aux actionnaires de Medica, sans aucune sortie de cash de la part de Korian.
Compte tenu de la valeur respective de chacune des deux entités, qui a permis de déterminer la parité d’échange retenue, les actionnaires de Medica recevront donc, dans le cadre de la fusion et en contrepartie du patrimoine transmis à Korian, 10 actions Korian pour 11 actions Medica1. « Cela nous permet de garder des marges de manœuvre pour continuer à croître par acquisitions », explique M. Coléou.
Le montage, approuvé à l’unanimité par les conseils d’administration de Korian et de Medica en novembre 2013, a vraisemblablement été facilité par la présence d’actionnaires communs aux deux groupes, animés par la volonté de réunir leurs participations au sein d’un seul et même véhicule coté : le principal actionnaire de Korian (avec 31,3 % du capital) est Prédica, filiale prévoyance du Crédit Agricole, ce dernier détenant près de 11,3 % de Medica. Batipart, détient 10 % des actions Medica et 24,4 % des actions Korian. Ce seront donc eux les premiers actionnaires du nouvel ensemble, avec respectivement 20 % et 16 % du capital.
A propos des auteures
Sophie de SENILHES, Avocat associé Ingénierie des sociétés
Solenne BRUGERE, Avocat associé, Droit de la Santé
Cet article a été publié par la Rédaction le