Le ton monte à propos des accords de prévoyance de la branche domicile entre les fédérations du secteur. La FEDESAP/FFEC annoncent de leur côté un « accord historique et structurant pour la branche des SAP », le SYNERPA et la FESP dénoncent du leur « un accord conclu de manière déloyale ». Explications.
Le désaccord sur les accords de prévoyance des service à la personne est profond, dans leurs communiqués respectifs la FEDESAP/FFEC et FESP/SYNERPA s’opposent avec fermeté.
Accords de branche Services à la personne sur la prévoyance
Depuis plusieurs mois se tiennent au sein de la branche des entreprises de Services à la personne des négociations sur la mise en œuvre d’un régime de prévoyance. Le 6 février dernier, dans le cadre de la dernière réunion sur le sujet, un accord porté par l’ensemble des organisations patronales, a été présenté et défendu en séance. Celui-ci prévoyait la généralisation du régime de prévoyance à l’ensemble des salariés du secteur disposant de plus de deux mois d’ancienneté au sein de leur entreprise, au lieu des douze mois portés initialement.
Pour la FESP et le SYNERPA cette condition d’ancienneté est nécessaire pour garantir l’équilibre économique du dispositif et répondre au taux de turnover particulièrement élevé dans le secteur (50 % durant la période d’essai).
Or, la FEDESAP a présenté en séance un texte alternatif, signé par l’ensemble des organisations syndicales, sans aucune condition d’ancienneté.
Le point de vue de la FEDESAP/FFEC

Pour la FEDESAP, les partenaires sociaux de la branche ont signé un accord mettant en place un régime de prévoyance destiné à couvrir l’invalidité et le décès des salariés. Ce dispositif renforce la protection sociale du secteur en assurant une couverture commune et équilibrée, répondant ainsi aux attentes de sécurisation tant des employés que des employeurs.
« Il s’agit d’une avancée sociale majeure, marquée pour la première fois par la signature unanime des organisations syndicales de salariés. Ainsi, la CFDT, la CFTC, la CGT et la FGTA-FO, aux côtés de la Fédésap et de la FFEC, ont approuvé cet accord. »
FEDESAP
Vision de la FESP et du SYNERPA


Le Synerpa Domicile et la FESP expriment leur vive opposition à l’accord de prévoyance signé le 28 février 2025 par la FEDESAP et la FFEC, côté employeurs, et l’ensemble des organisations syndicales de salariés. Cet accord, conclu de manière déloyale, qui intègre une couverture immédiate sans condition d’ancienneté, est en décalage avec la réalité du secteur, risque d’entrainer des effets délétères et est déconnecté des réalités économiques du secteur.
Processus de négociation déloyal
VS
Basses considérations d’égo

FESP et SYNERPA dénoncent un processus de négociation déloyal et un cadre financier déséquilibré qui fragilise le secteur
Pour la FESP et le SYNERPA, la condition d’ancienneté vise à permettre de pérenniser le dispositif de prévoyance auprès des salariés confirmés dans l’entreprise à l’issue de leur période d’essai tout en permettant aux structures, outre l’impact économique, de tenir compte des difficultés en termes de ressources humaines qu’entrainent les entrées et sorties de régime.
« Cette approche pragmatique vise à garantir un accès durable à cet avantage social sans mettre en danger la viabilité des entreprises.
FESP/SYNERPA
Dans une branche où la rentabilité nette est extrêmement faible (de 0 à 3 %), il est crucial de rationaliser les charges afin de préserver l’équilibre des structures d’autant que le dispositif, dont le coût global est de 60 millions d’euros par an dans la branche, va impacter les entreprises et les salariés à raison de 0,90 % de leur masse salariale.«
Le Synerpa Domicile et la FESP annoncent soutenir depuis toujours la mise en place d’une prévoyance de branche et avoir activement participé aux négociations pour construire un dispositif adapté à la réalité. Or, la version de l’accord adoptée et défendu par la FEDESAP représente pour FESP/SYNERPA une charge importante pour les entreprises et n’a pas été pensée avec une prise en compte suffisante des contraintes économiques des employeurs risquant de fragiliser les structures, en particulier les plus petites, et de mettre en péril l’équilibre de nombreuses entreprises.
Structurer une filière professionnelle durable et équilibrée pour la FEDESAP et la FFEC
Pour la FFEC et la Fédésap, l’objectif est clair : structurer une filière professionnelle solide et équilibrée, respectueuse des salariés et des entreprises, malgré un contexte économique exigeant. Il s’agit également de valoriser les métiers du secteur et de donner un nouvel élan à sa Convention Collective, treize ans après sa mise en place.
« Cet accord historique et structurant pour la branche des SAP et des crèches privées est menacé par la FESP et le Synerpa Domicile pour de basses considérations… d’égo »
FEDESAP
Toujours pour la FEDESAP, cet accord offre aux salariés une protection en cas d’invalidité et de décès. Reposant sur les principes de solidarité et de responsabilité, il propose une prise en charge adaptée aux spécificités du secteur. Dans un contexte marqué par des difficultés de recrutement et de fidélisation, renforcer la protection sociale constitue un levier essentiel pour accroître l’attractivité des entreprises. Une couverture lisible et accessible envoie un message positif, favorisant la stabilité des parcours professionnels et mettant en valeur nos « beaux métiers ».
Une approche pourtant commune : la pérennité du secteur
FESP/SYNERPA : Les hausses du coût du travail ne peuvent pas être répercutées
FESP et SYNERPA placent le débat dans un contexte déjà marqué par des défaillances d’entreprises croissantes, des marges extrêmement réduites. En effet, qu’elles interviennent dans le champ de la petite enfance (garde d’enfants à domicile, crèche, micro-crèche), de l’aide à domicile (SAD, portage de repas) ou encore de la vie quotidienne (ménage, repassage, etc.) les entreprises subissent de plein fouet les augmentations successives du coût du travail et de la vie ainsi que l’instabilité réglementaire qui impactent également leurs charges (réduction des exonérations patronales, diminution des aides à l’apprentissage, etc.).
En outre, et pour bon nombre de structures, ces hausses du coût du travail ne peuvent être répercutées, ou que très faiblement, dans leurs prix dont les tarifs sont encadrés annuellement par l’état et dont l’évolution de ces tarifs est systématiquement inférieure aux charges réellement supportées par les structures.
« Oui, pour de nombreuses entreprises du secteur, 18 euros par mois par salarié représentent une somme importante ! C’est ce que de nombreux adhérents nous ont fait remonter !!«
FESP/SYNERPA
« 9 € par mois et par salarié est un « coup » insupportable actuellement par nos structures qui ont déjà subi les multiples augmentations de SMIC en 2023 et 2024, puis la charge supplémentaire due à l’acquisition et donc la provision des congés payés pendant les arrêts maladie qui eux même ne cessent d’augmenter, sans parler de la baisse des exonérations de charge », c’est ce que portaient les entreprises adhérentes de la FESP et du Synerpa Domicile informées du contenu des négociations.
Du côté de la FEDESAP/FFEC, ce débat sur l’ancienneté est un enjeu politisé pour un coût minime
La question de l’ancienneté pour bénéficier de cette couverture a fait l’objet de discussions approfondies durant les trois années de négociation. L’accord final instaure une protection immédiate, assurant une égalité d’accès aux garanties tout en maintenant un équilibre viable pour les entreprises.
Si la FESP et le Synerpa Domicile s’opposent à cet accord en invoquant un risque économique, il est essentiel de rappeler que son impact financier s’élève à seulement 18 euros par salarié sur l’ensemble de sa carrière dans l’entreprise. Une contribution minime au regard des bénéfices sociaux apportés et de l’enjeu crucial de renforcer l’attractivité du secteur.
« D’ailleurs, les EHPAD représentés par le Synerpa appliquent déjà une prévoyance sans condition d’ancienneté. Ce qui est valable pour les établissements ne le serait donc pas pour le domicile ? » Une contradiction difficile à justifier.
FEDESAP
Instaurer une condition d’ancienneté ajouterait une contrainte administrative inutile pour la FEDESAP, notamment pour les petites structures sans service RH dédié, et l’organisation de dénoncer un risque juridique pour les petites structures, ignoré par la FESP et le Synerpa Domicile.
« Un employeur omettant l’adhésion d’un salarié au début du troisième mois engagerait directement sa responsabilité juridique. Se prétendre défenseur des « petits » impose de connaître la réalité du terrain ! »
FEDESAP
Accords de branche Prévoyance Services à la personne : quelle suite à venir ?

Le Synerpa Domicile et la FESP s’opposent fermement à l’application de cet accord pour défendre les intérêts des entreprises du secteur qu’elles représentent
Néanmoins, la FESP et le Synerpa Domicile continueront de défendre auprès des organisations syndicales l’accord de prévoyance qu’elles ont négocié et qui permet d’assurer la pérennité du secteur.
Face à cette situation, FESP et SYNERPA appellent à une révision du texte afin qu’il prenne en compte :
- Les réalités économiques et sociales des structures de services à la personne, en garantissant un déploiement progressif et une meilleure adaptation aux taux de turnover.
- Un dialogue social constructif et loyal, dans lequel les décisions ne sont pas imposées au détriment de la majorité des opérateurs de la branche.
Dans cette optique, le Synerpa Domicile et la FESP s’engagent à continuer d’œuvrer au sein de la branche, et notamment auprès des organisations syndicales de salariés pour tenter d’arriver à une solution plus équitable. Le dialogue doit demeurer ouvert et permettre d’aboutir à une protection sociale adaptée et supportable pour l’ensemble des acteurs d’autant que de nombreux enjeux et travaux sont en cours au sein de la branche et pour lesquels la FESP et le Synerpa Domicile sont moteurs (NAO, classifications des postes administratifs et des postes de crèches, etc.).
Le Synerpa Domicile et la FESP annoncent rester déterminés à défendre les intérêts des entreprises et des salariés et continueront d’agir pour préserver un modèle social juste, équilibré et soutenable sur le long terme.
De son côté la FEDESAP considère que l’attitude de ses confrères entrave le dialogue social et fragilise la profession
Pour la FEDESAP, l’opposition de la FESP et du Synerpa Domicile ne se limite pas à cet accord : elle freine l’ensemble du dialogue social au sein de la branche, empêchant notamment le déblocage des budgets dédiés à la formation. Plutôt que de contribuer à la valorisation de nos métiers, cette posture alimente une communication négative dont le secteur ne saurait tirer profit.
En signant cet accord, la FFEC, la Fédésap et les organisations syndicales réaffirment leur volonté de bâtir un cadre social juste et adapté aux défis du secteur. « Alors que d’autres négociations cruciales sont en cours, l’Histoire retiendra que pour des intérêts personnels, la FESP et le Synerpa Domicile ont privilégié des considérations individuelles au détriment de l’intérêt général ».
Souhaitons que ces 4 fédérations majeures du secteur puissent enterrer rapidement cette querelle.
Cet article a été publié par la Rédaction le