Fruit d’un travail collégial inédit, élaboré par un collectif de 60 contributeurs et coconstruit avec plus de 8 000 citoyens votants ayant formulés près de 250 recommandations, le premier rapport citoyen des États Généraux de la séniorisation de la société a été officiellement présenté au grand public le 8 mai dernier au travers d’une visioconférence.
Ce rapport, inédit dans sa forme comme dans son contenu, est scindé en deux chapitres. En premier lieu, il formule un ensemble de recommandations structurantes – coconstruites avec tous – en faveur d’une politique efficiente et bienveillante du Grand Âge. Dans un second temps, il s’articule autour de 60 contributions écrites – élaborées par chacun des membres du collectif – ciblant un sujet, une question, un enjeu lié à la séniorisation de la société, et sous toutes ses formes.
La visioconférence de restitution du rapport des États Généraux de la séniorisation
En cette période de confinement, la séniorisation continue !
Ce document se veut une contribution utile pour l’avenir. Il témoigne d’une ambition collective pour que la crise du Covid-19 ne soit pas qu’une parenthèse vite oubliée. Ces États généraux initiés dès le début du confinement sont le fruit d’une coconstruction entre des acteurs et des experts engagés, des élus impliqués et des citoyens formés par l’expérience.
Ensemble, nous avons fait le pari d’une initiative tranvsersale, transpartisane et « transvers’âge ».
L’enjeu, était alors de penser et d’affirmer collectivement la nécessité d’une politique de l’âge. Une vision politique de la séniorisation de la société. Une ambition collégiale fondée sur le décloisonnement des acteurs rassemblant également toutes les générations. La séniorisation est une réalité touchant la société dans son ensemble. Nous sommes tous, les jeunes comme les vieux dans un monde qui prend de l’âge. Ce « nous sommes » de Camus : « j’ai besoin des autres qui ont besoin de moi », écrit-il dans L’Homme révolté. Les plus âgés ont besoin des plus jeunes, et les plus jeunes ont besoin des plus âgés.
Ce document veut aussi exprimer combien les plus âgés, les vieux, ne sont pas « nos aînés », mais des adultes qu’il convient d’écouter et d’entendre.
Des adultes participant de la vie du pays et dont le confinement a montré combien ils ont manqué au tissu familial, amical et associatif.
Des adultes prenant ainsi leur part dans toutes les formes de solidarité : rappelons qu’ils sont les premiers à faire tenir les associations, à s’impliquer comme aidants ou comme patients partenaires auprès des plus âgés et/ou fragilisés.
Des adultes avant tout citoyens et souvent engagés dans la vie de leur territoire, de leur commune, de leur quartier.
Des adultes ayant une part à prendre dans ce débat, plus encore lorsqu’il s’agit de construire des lois et des politiques les concernant directement.
Pas de politique des aînés sans les aînés. Pas de politique des vieux sans se donner les moyens d’entendre la voix, la diversité des voix des plus âgés. Pas de politique des âges sans prendre la mesure des attentes, des contraintes et des situations caractéristiques traversées par les différentes générations.
Comment mieux entendre et inclure les demandes de personnes fragilisées, notamment sur le plan neurologique ? Combien de fois avons-nous entendu le terme « Alzheimer » lors de cette crise ? Comment mieux écouter les besoins et les attentes des personnes âgées handicapées ? Comment renforcer la place et la parole des aidants comme celle des patients partenaires ? En outre, pourrions-nous imaginer une politique de soin sans prendre en compte l’expérience et la demande des premiers concernés ?
C’est bien là tout l’enjeu de notre démarche originale et de ce rapport collégial. En effet, il ne s’agit ni d’un énième rapport commandé « d’en haut » ni d’un catalogue de revendications pécuniaires. Il s’agit d’un travail inédit coconstruit « par le bas » proposant à la fois des recommandations structurantes et des pistes variées d’amélioration à partir de regards croisés.
Ces regards émanent d’experts impliqués, d’acteurs de terrain, d’élus, de responsables politiques, de représentants institutionnels, de citoyens, etc. Tous se sont ainsi impliqués, afin de porter le débat, de faire entendre une voix – et une voie – complémentaire à la réforme porteuse d’un acte fondateur sur un thème de cohésion sociale.
À travers la démarche initiée, nous avons ainsi cherché à établir un échange citoyen en présentant de façon transparente, l’ensemble des propositions élaborées par le collectif. Un vote permettant ainsi de manifester son degré d’adhésion pour chacune des propositions, mais également d’en formuler de nouvelles. Cette dynamique « d’aller et retour » a permis d’enrichir le
projet et le structurer au plus près de la vision des Françaises et des français souhaitant s’impliquer dans la politique du Grand Âge.Concernant le collectif, la démarche de vote proposée a été identique à la consultation citoyenne. Pour autant, il ne s’agissait pas tant de rechercher absolument un consensus, les 60 membres du collectif ayant des regards différents, parfois opposés, mais plutôt de poser des pistes de réflexions communes et structurantes. En outre, il s’agissait de s’extraire du confort d’une
« pensée balisée », afin de faire turbuler positivement le système. En effet, si les membres du collectif expriment nécessairement des pensées divergentes, ils
confluent unanimement sur une conviction fondamentale : une loi performante ne peut se contenter d’annoncer des moyens supplémentaires sans transformer l’organisation dans son ensemble. Sans non plus s’extraire d’une bureaucratie centralisatrice éloignée du terrain, des conditions d’exercice du soin, des publics, etc. Au risque d’un changement et de moyens minimalistes.La mutation économique, sanitaire, sociale, culturelle, scientifique, institutionnelle et écologique qui suivra la crise du Covid-19 implique de penser les organisations et l’implication des personnes en priorité.
Serge Guérin, Véronique Suissa, Philippe Denormandie
Cet article a été publié par la Rédaction le