Jean-Paul Delevoye, haut commissaire de la réforme à la retraite a remis ce matin son rapport relatif au nouveau système de retraites au premier ministre Edouard Philippe. Devant servir d’appui pour le projet de loi à venir, il est probable que ce texte soit prochainement présenté au Conseil des ministres puis examiné par le Parlement afin d’entrer en vigueur dès 2025 pour instaurer un système de retraite « universel » qui touchera d’abord toutes les personnes nées en 1963. Retour complet sur les préconisation de Jean-Paul Delevoye remises le 18 juillet 2019.
Les chiffres de la retraite en France
En France, le budget des retraites est le premier poste de dépenses de protection sociale et représente 13,8% du PIB.
Le nombre de retraités est quant à lui en augmentation permanente. En 2017, on dénombrait 16,2 millions de retraités soit 25% de la population et 708 000 personnes de plus que l’année précédente.
Globalement, même s’il demeure des disparités, les retraités ont un niveau de vie favorable avec une retraite nette moyenne de 1 547€ en décembre 2017 contre 1 521€ en 2016 pour un niveau de vie médian représentant 21 930€ annuels contre seulement 20 520€ pour le reste de la population.
Consulter le rapport complet de Jean-Paul Delevoye relatif à un système de retraite universel
42 régimes (de trop) pour le système actuel de retraite
Avec ces 42 régimes différents (soit plus de trois régimes en moyenne par assuré) le système actuel des retraites est devenu illisible et générateur d’injustice. Par exemple, notre système actuel ne favorise pas les assurés avec des périodes d’activité courtes ou fréquemment interrompues. Selon le rapport de Jean-Paul Delevoye ce système n’est plus en phase avec les réalités du monde du travail, il devient instable et difficilement pilotable, et génère un important manque de confiance notamment chez les plus jeunes.
Le nouveau projet de retraite proposé par Jean-Paul Delevoye
« Cette proposition de système universel veut contribuer à la construction de la protection sociale du XXIème siècle telle que souhaitée par le Président de la République et, conformément au cadre fixé par le Premier ministre, elle vise à renforcer l’équité entre les générations, à mieux protéger les plus fragiles, à restaurer la confiance des Français et à redonner de la valeur au travail. » a déclaré Jean-Paul Delevoye dans son rapport.
« La Sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. Trouvant sa justification dans un souci élémentaire de justice sociale, elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain. «
Exposé des motifs de l’ordonnance du 4 octobre 1945
« A société nouvelle, réponse nouvelle. (…) C’est l’esprit de notre Nation de retrouver le bien commun d’une solidarité assumée entre actifs et inactifs, bien portants et malades, travailleurs et chômeurs, valides et invalides. (…)
Ce projet est le vôtre, nous avons mobilisé l’intelligence de tous, citoyens, parlementaires, partenaires sociaux, administrations. Que tous ceux qui ont participé à ce travail considérable par leur réflexion et le temps qu’ils nous ont donné en soient ici sincèrement remerciés, et en particulier Madame la ministre des solidarités et de la santé qui a apporté son concours personnel et tout le soutien de son ministère à cette démarche. » a ajouté Jean-Paul Delevoye.
AGNÈS BUZYN, Ministre des solidarités et de la santé, a pour sa part déclaré que le « système de retraites, c’est un choix de société et le choix de la France fut, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, d’assurer la solidarité entre les générations par une assurance retraite publique et généralisée. (…) J’ai à cœur de défendre ce soubassement de notre cohésion nationale. (…) La protection sociale du XXIe siècle doit tenir compte de cette nouvelle réalité du travail et des nouvelles trajectoires qu’il engendre. Elle doit aussi veiller à ce que les Français se reconnaissent et adhèrent à un système clair et lisible. C’était un engagement de campagne du Président de la République. Pour retrouver du sens et de la confiance, il faut refonder les principes de solidarité et d’universalité, pour les rendre à nouveau concrets et tangibles. En revenant à ces principes et en les respectant scrupuleusement, nous redonnerons à notre système de retraite les moyens d’être juste, équitable et pérenne.«
Les douze axes d’un système de retraite universel
1 – Un système en points qui sera plus simple et commun à tous les Français et qui remplacera les 42 régimes de retraite actuels. Les régimes spéciaux seront fermés et le système sera financé par répartition.
2 – Un système plus juste où un euro cotisé vaudra les mêmes droits pour tous : chaque jour travaillé permettra d’acquérir des points, chaque point permettra d’augmenter le niveau de sa retraite, il n’y aura plus de trimestre inutile.
3 – Un système qui garantira un haut niveau de protection sociale, 100% des actifs seront couverts par le système universel et s’ouvriront des droits sur la totalité de leur rémunération.
4 – Un système qui valorisera l’activité : les assurés pourront partir à la retraite à 62 ans et il est proposé que pour la génération 1963 l’âge du taux plein soit fixé à 64 ans (l’âge d’équilibre du système).
5 – Un système qui sera plus solidaire notamment vis à vis des femmes : les périodes de chômage indemnisé, maternité, invalidité et maladie donneront droit à des points de solidarité. Le minimum de retraite sera augmenté à 58% du SMIC net et il est proposé une majoration des points de 5% attribuée dès le premier enfant et pour chaque enfant.
6 – Un niveau des retraites qui sera sécurisé dans le temps : la valeur du point ne pourra pas baisser dans le temps, un fonds de réserve universel permettra de garantir l’équilibre du système et de garantir la valeur du point face aux aléas démographiques et économiques.
7 – Un système qui réduira les inégalités entre les retraités : les futurs retraités ayant les revenus les plus modestes et des carrières difficiles bénéficieront d’une hausse significative, l’écart entre les retraites des hommes et des femmes sera légalement réduit.
8 – Un système qui reconnaîtra la pénibilité et les spécificités de certains métiers, l’âge légal de 62 ans s’appliquera de façon identique entre salariés du public et du privé pour un métier similaire. Les départs anticipés à 60 ans pour les assurés ayant effectué une carrière longue sera toutefois garantie. La pénibilité sera également prise en compte avec la possibilité de partir avant 62 ans à la retraite.
9 – Un système qui sera mieux adapté aux réalités du monde du travail : le système universel pourra valoriser le début de carrière des jeunes actifs, des points de solidarité seront également attribués aux proches aidants.
10 – Des dispositifs de transition emploi-retraite qui seront plus attractifs : les personnes déjà retraitées pourront désormais reprendre une activité sans plafond ni limites à compter de l’âge du taux plein, et constitueront ainsi de nouveaux droits à la retraite.
11 – La transition vers le nouveau système sera très progressive : le système universel pourra s’appliquer au plus tôt aux personnes nées en 1963.
12 – Une gouvernance qui sera innovante pour un système conçu à l’équilibre en 2025 : les modalités seront concertées avec les partenaires sociaux, le poids de la solidarité dans les dépenses de retraite restera stable, une règle d’or d’équilibre sera mise en place pour garantir la pérennité de la trajectoire financière du système de retraite. Enfin, une caisse nationale de retraite universelle, la CNRU, sera créée pour une mise en place et une gestion opérationnelle du système universel, un conseil citoyen fera chaque année des propositions et un comité d’expertise indépendant des retraites sera créé.
Ce rapport de Jean-Paul Delevoye est accueilli avec prudence par les syndicats notamment sur le principe de taux plein à 64 ans, l’heure est maintenant aux concertations jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi en 2025.
Cet article a été publié par la Rédaction le