Distribution : Tribune libre à Christophe JAFFRY, fondateur des Clés du Choix

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Le développement de la silver économie nécessite une adaptation des modes de distribution des produits et services destinés aux seniors mais pas seulement. Il faut surtout une modification profonde des modes de pensée. Il est temps de s’affranchir et de dépasser les clichés et les vieux clivages public/privé.

Christophe JAFFRY

Christophe Jaffry
Christophe Jaffry Fondateur des Clés du Choix

Jérôme PIGNIEZ – Silver Eco : De très nombreux produits et services spécifiques aux seniors sont actuellement présents sur le marché or bon nombre de ces seniors n’ont pas connaissance de leur existence et des bénéfices qu’ils pourraient en retirer. Lorsqu’ils en ont entendu parler, il leur est souvent difficile de les trouver.

Les circuits de vente traditionnels n’ont pas encore sauté le pas du référencement d’articles dédiés aux seniors. Autant par manque d’anticipation que par peur d’écorner leur image avec des biens de consommation moins « vendeurs » que des télévisions dernier cri, des vêtements ou des accessoires à la mode. Toutes ces raisons font que la silver économie peine à décoller alors que nous sommes tous d’accord pour dire qu’elle a d’immenses perspectives de développement. Face à ce constat, que faire ?

Trouver de nouveaux relais de distribution ?

Christophe JAFFRY : Une partie du problème est posée. Nous nous trouvons face à un marché en devenir, qui s’ouvre et se construit. Il ne peut difficilement s’envisager avec des réflexes et des codes issus du passé. J’en ai fait l’expérience personnelle en 1998 lors de l’ouverture du marché des télécoms, puis en 2004 et en 2007 lors de l’ouverture des marchés de l’électricité et du gaz. A ces différentes époques il a fallu penser autrement et innover commercialement afin de rentrer sur ces marchés et nous positionner.

Le marché des seniors constitue une mine d’or en France

Cela a permis de créer de l’emploi, de la valeur, et offrir le choix aux clients. Le marché dont nous parlons aujourd’hui, celui des seniors, est parfois présenté comme un nouvel eldorado, un gisement d’or gris, une mine d’or… Effectivement, une mine :

  • Une mine où les chercheurs d’or sont poussés à imaginer ,développer des systèmes d’extraction et de gestion de l’or avant même d’avoir trouvé les filons et surtout avant même de savoir si cela conviendrai à la manipulation de ce minerai. Et surtout avant même de savoir s’il y a des acheteurs!
  • Une mine à ciel ouvert sans réelle exploitation si ce n’est qu’une exploitation partielle : la dépendance, la fin de vie le handicap, la maladie. En résumé, la souffrance et la détresse. Le marché ne se limite pas aux seuls très âgés, isolés et souffrants.
  • Une mine ou les gestionnaires du terrain ont identifié les risques mais ne semble pas vouloir véritablement intervenir ou alors dans certaines conditions et en choisissant avec qui. Pour finir sur une note d’humour, il semblerait que ce soit les vendeurs de tamis et de pelles qui recueillent le plus de bénéfices. En l’occurrence les sociétés de conseil qui produisent moult études et recommandations sur le sujet. Vendues à prix d’or cela va de soi.

Trois freins au développement et à la structuration de la filière Silver économie

Au-delà de cette allégorie de la mine, j’identifie aujourd’hui trois freins au développement et la structuration de la filière silver économie.

Le premier est la course au développement technologique et à la recherche, motivée par l’attribution de subventions, un mal français. Il est bien sûr nécessaire de progresser en matière de technologies mais pourquoi ne pas commencer par un inventaire des solutions déjà existantes ? Elles ont été financées par l’argent des contribuables, certaines fonctionnent à un niveau régional uniquement, on pourrait envisager de les répertorier au niveau national afin d’étendre leur application.

Le deuxième est le fait de ne penser à agir qu’après constat d’une situation de fragilité, voire de dépendance. On intervient en mode curatif, une fois que les personnes âgées ont vécu un accident domestique. Le système classique se met alors en marche : hospitalisation, soins, aide à domicile, aménagement, systèmes de sécurité, appareillages divers et variés… C’est ce que j’appelle un corporatisme de situation, dont bien des acteurs en place souhaitent sortir. Il faut aujourd’hui s’adresser aussi et surtout aux seniors bien portants afin de faire de la prévention et de les inciter à envisager de futures aides au quotidien de manière sereine et décomplexée, qu’il s’agisse de produits ou de services.

Le troisième frein au développement de la filière est le clivage public/privé. Depuis longtemps en France on oppose le « privé lucratif », c’est à dire les entreprises ayant pour objectif de réaliser des bénéfices, au « public bienveillant », mû par la seule volonté d’aider les citoyens et dénué de toute intention de profit. A croire qu’il y aurait d’un côté les méchants profiteurs et de l’autre les gentils bienfaiteurs. Rappelons à toutes fins utiles que sans le secteur privé, point d’économie et point d’existence. Et qu’il est possible de réaliser des bénéfices sans pour autant sacrifier son éthique.

Je mets de côté la « mauvaise image » des âgés, dans une société qui fait l’éloge de la beauté en faisant la promotion de crèmes anti ride, par des mannequins qui viennent tout juste de dépasser l’âge de la puberté, et lorsque l’on a plus de 50 ans ont perd toutes ses chances sur le marché du travail. Mon regard assez neuf et mon expérience sur cet environnement, m’amènent à penser que le succès de la silver économie passera par une révolution des modes de pensée et du dépassement des vieux clivages et clichés public/privé bien plus que par les modes de distribution. Logo Les Clés du ChoixLes Clés du Choix est né du constat que les produits et services à destination des seniors pâtissent d’un manque de mise en avant réel et sérieux. Nous avons décidé de développer une plate-forme de produits et services (guichet unique) dédiée au monde des seniors, afin d’apporter un maximum d’éclairage sur ce qui leurs est accessible, en terme d’informatique, de téléphonie, d’assurance, de sécurité, de conseils, de services, d’amélioration de l’habitat. L’objectif poursuit étant d’agir comme une véritable plate-forme de collaboration intégrant les différents acteurs en place (privés, publiques, associatifs, professionnels) en créant des convergences d’actions, et ce de manière à ne pas répondre de manière compartimentée et en silo comme cela se fait aujourd’hui.

Agir comme chef d’orchestre en ayant pour but avant tout, d’apporter au client une réponse adaptée, logique et de bon sens, dans la durée. Il ne peut pas y avoir une seule réponse possible face à l’hétérogénéité des situations et de la population des seniors, c’est la raison pour laquelle notre position de « courtier » en produits et services pour seniors prend tout son sens.

Nous « militons » au quotidien pour instaurer cette démarche avec nos partenaires et invitons à penser éthique et collaboratif dans l’action. Notre démarche commerciale est à la fois solidaire et responsable vis-à-vis de nos clients, nos parents, nos proches, nos aînés et avant tout, nos concitoyens.


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Cet article a été publié par la Rédaction le

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