En 2019, avant que la pandémie de COVID-19 ne mette en lumière les fragilités de la santé mentale à l’échelle mondiale. Environ 6 % des Européens souffraient déjà de syndromes dépressifs selon une étude de la DREES basée sur l’European Health Interview Survey (EHIS). Ce taux global masque d’importantes disparités géographiques et démographiques, en particulier pour la dépression des seniors, une tranche d’âge particulièrement vulnérable à cette problématique.
Dépression chez les seniors : Des disparités régionales marquées
Le taux de dépression chez les seniors de 70 ans et plus varie considérablement selon les régions. En moyenne, 12 % des personnes âgées dans les pays du sud et de l’est de l’Europe souffrent de syndromes dépressifs, tandis qu’en Europe du Nord, ce chiffre descend à 5 %. La France, avec un taux de 16 %, se classe parmi les pays les plus touchés en Europe de l’Ouest, devancée cependant par le Portugal ou encore la Croatie où la prévalence dépasse 15 %. À l’opposé, la Grèce et la Serbie affichent des taux remarquablement bas, avoisinant les 5 %.
Selon l’étude de la DREES, ces disparités s’expliquent par une différence en matière de système de soins, de niveau de vie et de structures sociales dans les pays concernés. En Europe du Nord, un investissement massif dans les soins de longue durée (SLD) contribue à une meilleure prise en charge des seniors, réduisant ainsi leur risque de souffrir de syndrome dépressif.
Les femmes âgées, plus touchées par la dépression que les hommes
La dépression affecte davantage les femmes âgées que leurs homologues masculins dans toutes les régions. Ce déséquilibre est exacerbé par des facteurs tels que le veuvage, particulièrement fréquent en Europe de l’est où les écarts d’espérance de vie entre les hommes et les femmes sont importants. En effet, les femmes veuves de plus de 70 ans présentent un risque accru de dépression, notamment dans les pays où les systèmes de soutien social et familial sont faibles.
Mauvaise santé et isolement social : des facteurs clé de la dépression chez les seniors
Un mauvais état de santé est l’un des principaux facteurs associés à la dépression chez les seniors en Europe.
En moyenne, les personnes âgées en mauvaise santé sont 27% plus susceptibles de souffrir de dépression que celles en bonne santé. Cet effet est particulièrement prononcé en Europe du Sud (32%) où les maladies chroniques et les limitations physiques sont plus fréquentes.
L’isolement social joue également un rôle déterminant.
Les seniors bénéficiant d’un soutien social élevé sont moins enclins à souffrir de dépression (-11% en moyenne), un effet particulièrement visible en Europe de l’Ouest (-17%). À l’inverse, dans les pays où les seniors sont plus souvent isolés (comme en Europe de l’Est), les risques augmentent. L’isolement social est un fléau à combattre, puisque rappelons le, diverses études telles que le baromètre Isolement et Solitude des Petits Frères des Pauvres montrent que l’isolement social chez les personnes âgées augmente considérablement le risque de développer des maladies graves. Le risque d’avoir une crise cardiaque est augmenté de 29 %, celui d’avoir un AVC de 32 %, etc.
Le rôle du veuvage et des revenus
Le veuvage augmente de 4% en moyenne la probabilité de souffrir de dépression, un effet particulièrement marqué en Europe de l’Est (+8%). Dans les pays du Nord, où les services sociaux et médicaux pour les seniors veufs sont plus développés, cet impact est moindre. De plus, l’écart d’espérance de vie entre homme et femme y est moins marqué que dans les pays du Sud ou de l’Est.
Quant au niveau de revenu, son influence sur la dépression est globalement limitée, sauf en Europe du Sud, où les seniors les plus aisés ont 2 à 8% de probabilité en moins d’être déprimés que les plus modestes. Ces disparités économiques contribuent à expliquer pourquoi les seniors des pays du sud et de l’est, où la pauvreté et la précarité matérielle sont plus courantes, sont plus touchés par la dépression.
Enjeux et perspectives de la dépression des seniors européens
Cette étude met en lumière l’importance d’une prise en charge globale des seniors pour prévenir la dépression. Elle souligne notamment :
- L’urgence d’améliorer les soins de santé pour les seniors, particulièrement dans les pays du sud et de l’est.
- Le rôle crucial du soutien social : renforcer les réseaux de proximité, qu’ils soient familiaux, communautaires ou institutionnels, afin de réduire l’isolement voir la mort sociale des seniors
- La nécessité de politiques ciblées pour les femmes, en particulier lorsqu’elles sont veuves, afin de limiter leur vulnérabilité face à la dépression.
Enfin, la pandémie de COVID-19 a exacerbé les défis posés par la dépression chez les seniors, soulignant l’urgence de mettre en place des politiques durables et inclusives pour préserver leur santé mentale. Les données posts 2020 seront donc cruciales afin d’affiner les réponses à cette problématique qui concerne une part croissante de la population européenne. De plus, la dépression touchant plus particulièrement les jeunes depuis la pandémie, il est crucial de revoir notre système de prise en charge afin de préserver les seniors de demain de toute problématique psychologique.
Cet article a été publié par la Rédaction le