Un allégement des tensions RH mais une forte aggravation de la situation financière dans les établissements et services pour personnes âgées : voici ce que révèle la dernière enquête menée par la Fédération nationale des associations de directeurs d’établissements et services pour personnes âgées (FNADEPA). Un chaud-froid qui rappelle la nécessité d’engager une réforme structurelle de l’organisation et du financement des établissements et des services via un projet de loi Grand âge, tel que prévu par la loi « Bien vieillir ».
La FNADEPA publie son baromètre biannuel de la situation RH et financière des établissements et services pour personnes âgées
La FNADEPA a interrogé ses 1 500 adhérents afin d’objectiver la situation par type de structures : Ehpad, résidences autonomie et services à domicile.
Sur le plan économique, malgré des soutiens financiers d’une ampleur record (crédits non reconductibles versés par les ARS, subventions des CCAS…) l’enquête – qui se base notamment sur les données des états réalisés des recettes et des dépenses (ERRD) – révèle une dégradation de la situation en 2023, dans la lignée des difficultés constatées en 2022.
Concernant la situation RH, si celle-ci reste préoccupante, elle s’est nettement améliorée en un an, soulignant que les actions mises en œuvre (limitation du recours à l’intérim, innovations dans les modes de recrutement, etc.) sont efficaces et doivent être intensifiées.
La FNADEPA rappelle la nécessité d’engager une réforme structurelle de l’organisation et du financement des établissements et des services et l’attente d’un projet de loi Grand âge, tel que prévu par la loi « Bien-vieillir ».
La situation financière des établissements et services pour personnes âgées continue de se dégrader, qu’ils soient de statuts publics comme privés
En effet, l’enquête menée par la FNADEPA révèle que plus de 65 % des ESMS (établissement ou service social ou médico-social) ont terminé l’année 2023 dans le rouge, avec un déficit moyen de 177 302 €. Avec une aggravation du niveau de déficit de 23 % entre 2022 et 2023.
Et ce, malgré :
- le recours à des réserves de compensation pour 69,6 % des structures,
- le versement d’aides pour 42,3 % d’entre elles (crédits non reconductibles, subventions publiques et associatives, fonds d’urgence…) témoignant d’un effort d’une ampleur inégalée de la part des ARS, Conseils départementaux et des communes pour secourir le secteur du Grand âge.
à Mi-2024 :
- 51,8 % estiment qu’ils auront des difficultés de trésorerie pour payer l’ensemble de leurs charges de fonctionnement. (53,6 % en 2023)
- 48,3 % ne disposent pas de réserves de compensation suffisantes pour couvrir un éventuel déficit. (45,5 % en 2023)
Durée estimée des réserves en cas de déficit
La FNADEPA constate une baisse des réserves par rapport à 2023 où 35,5 % pouvaient tenir un an ou moins pour compenser les déficits.
Analyse globale pour l’ensemble des établissements et services pour personnes âgées
- Taux d’occupation moyen de 95 %
- 14,6 % des établissements et services ont été contraints de fermer des lits ou de réduire des plans d’aide du fait de manque de personnel en 2023 (28,1 % en 2023)
- Pénurie de personnel :
- 58,1 % manquent de personnel : une amélioration ! (82,6 % en 2023).
- En moyenne, cela représente 4 ETP vacants
- Recours à l’intérim :
- En raison de la pénurie de personnel, 55,1 % des ESMS font régulièrement appel à l’intérim (65,3 % en 2023)
- 88,5 % des ESMS ont connu au moins une rupture de contrat en 2023
- En moyenne cela représente 4,8 ruptures de contrats de travail (démission, rupture conventionnelle) par établissement ou service sur l’année
Focus sur les EHPAD
- Taux d’occupation moyen : 97 %
- Déficit :
- 69,5 % des Ehpad sont déficitaires
- 61,1 % utilisent leurs réserves pour compenser ou limiter un déficit en 2023. (D55,9% en 2022)
- 46,4 % ont bénéficié d’aides financières pour limiter ou compenser un déficit en 2023.
- Le déficit moyen est de -195 072 € (154 195 € en 2023 soit une aggravation de 26 % en un an)
- Tarif prévisionnel à la hausse :
- Pour compenser les augmentations de charges dues à l’inflation, les directeurs estiment que leur tarif hébergement devrait augmenter : de +10 % (pour 49% des directeurs ayant répondu au baromètre), de 7 à 9 % (pour 22% des répondants), de 4 à 6 % (pour 25% des répondants), de 1 à 3 % (pour 4% des répondants)
- Taux d’évolution des tarifs hébergement :
- 53 % des Ehpad ont un taux d’évolution inférieur à 4,9 % (l’inflation s’établissait en 2023 à + 4,9 % selon l’Insee)
33,6 % des Ehpad ont une coupe PATHOS obsolète qui ne permet pas une réévaluation des moyens (Coupe pathos datant de 2019 ou antérieurement et non programmée sur 2024)
- 53 % des Ehpad ont un taux d’évolution inférieur à 4,9 % (l’inflation s’établissait en 2023 à + 4,9 % selon l’Insee)
- Pénurie de personnel :
- 66 % des Ehpad manquent de personnel (88 % en 2023)
Répartition des personnels manquants en EHPAD par catégorie
Focus Sur les Résidences Autonomie
Résultat pour l’exercice 2023
- Taux d’occupation moyen : 90 %
- Déficit :
- 54 % des résidences autonomie sont déficitaires (57 % en 2022)
- 40 % ont eu recours à leurs réserves pour compenser ou limiter un déficit en 2023 (39 % en 2022)
- 35,7 % ont bénéficié d’aides financières pour limiter ou compenser un éventuel déficit dont 80 % une subvention du CCAS. (Aucune résidence autonomie n’a bénéficié du fond d’aide via les commissions départementales)
- Le déficit moyen est de -103 489 € (83 152 € en 2022 soit une aggravation de 24,5 % en un an)
- Pénurie de personnel :
- 20,2 % des résidences autonomie manquent de personnel (54,9 % en 2022)
Focus sur les Services à domicile
Résultat pour l’exercice 2023
- Déficit :
- 50 % des services à domicile (SAD et SSIAD) sont déficitaires (66 % en 2022)
- Le déficit moyen est de -118 792 €
- Pénurie de personnel :
- 76,6 % font actuellement face à un manque de personnel (85,7 % en 2023)
« La situation atteint un niveau critique inédit.
Même sous perfusion, ce qui n’est déjà pas acceptable, notre secteur est en danger 48 % des établissements et services ne disposent pas de réserves de compensation suffisantes en cas de déficit.
Pour plus de la moitié des Ehpad, l’augmentation du tarif hébergement est restée inférieure à l’inflation. A domicile, ce n’est guère mieux, avec la moitié des services déficitaires. Sans réforme majeure, nous allons prendre de plein fouet le mur démographique ! »
Jean-Pierre Riso, président de la FNADEPA
Une situation RH qui s’améliore, mais une réforme structurelle toujours vivement attendue
Eclaircie, toute relative, car les tensions subsistent encore fortement : la situation RH semble s’améliorer dans les établissements et services. Ainsi, 58 % d’entre eux manquent de personnel — ils étaient 82 % l’année dernière, à hauteur de 4 ETP en moyenne. Preuve que les actions mises en œuvre (limitation du recours à l’intérim, innovations dans les modes de recrutement, etc.) sont efficaces et doivent être intensifiées.
La FNADEPA rappelle donc plus que jamais « la nécessité d’engager une réforme structurelle de l’accompagnement du grand âge via un projet de loi Grand âge, tel que prévu par la loi « Bien vieillir ». En cette période électorale, elle incite les futurs députés à s’emparer de ce sujet essentiel, tout particulièrement au regard du vieillissement de notre Nation. »
Cet article a été publié par la Rédaction le