Alors que la maladie d’Alzheimer suscite de plus en plus de craintes -75 % des Français déclarent en avoir peur selon le récent sondage Ifop/Fondation Médéric Alzheimer, sa prévention reste paradoxalement largement méconnue. Moins d’1 Français sur 10 sait qu’il existe des moyens permettant de la prévenir ou de la ralentir.
Perçue comme une conséquence inéluctable de l’avancée en âge, cette maladie neurodégénérative qui touchera plus de 2,2 millions de Français en 20502 en raison du vieillissement attendu de la population, ne peut plus être associée à une « fatalité » : elle pourrait être évitable dans 40 % des cas ; des actions de prévention efficaces existent pour réduire les facteurs de risque.
Imaginaire collectif, peur, déni… mais aussi espoirs, leviers et réalités à la lueur d’ambitions et projets concrets seront au cœur des débats de la 3e rencontre du Collectif Alzheimer Ensemble le 14 septembre 2021 autour de la question « Prévenir la maladie d’Alzheimer : une utopie ? ».
Organisée en digital depuis la Mairie de Lyon avec le concours du Pr Pierre Krolak-Salmon, neurologue et gériatre, directeur médical de l’Institut du Vieillissement aux Hospices Civils de Lyon (HCL), cette matinée sera rythmée par des regards croisés confrontant opinion des Français et points de vue scientifiques ainsi que des tables rondes faisant interagir représentants de programmes de recherche ou d’initiatives de terrain et collèges d’experts. Tous convergent en un seul et même leitmotiv : agir tôt et urgemment pour vivre longtemps en bonne santé cognitive et faire reculer l’apparition des troubles cognitifs et ses complications.
Retarder l’apparition des troubles cognitifs, gagner des années de vie en bonne santé cognitive et diminuer sa prévalence : la prévention de la maladie d’Alzheimer a un sens et une utilité. C’est le message que collectivement nous souhaitons porter !
Hélène Jacquemont, Présidente de la Fondation Médéric Alzheimer
Agir tôt, massivement et urgemment
Un chiffre résume à lui seule la situation : aujourd’hui, plus d’un tiers des personnes malades arrive encore trop tard en consultation mémoire pour que des solutions permettant de réduire les effets de la maladie leur soient proposées.
Pr Pierre Krolak-Salmon, Neurologue et gériatre, directeur médical de l’Institut du Vieillissement aux Hospices Civils de Lyon
Dans la première session le Pr Pierre Krolak-Salmon s’entretiendra avec Frédéric Dabi, Directeur Général Opinion du groupe Ifop autour de la perception des Français de la maladie d’Alzheimer. Elle est désormais connue par la quasi totalité d’entre eux et fait de plus en plus peur. Paradoxalement, alors même que 3 Français sur 4 craignent de développer un jour la maladie, les stratégies de prévention sont très largement méconnues du grand public.
Dans un entretien, le Pr Bruno Vellas, chef du service de gériatrie du CHU de Toulouse et coordonnateur du Gérontopôle insistera sur l’enjeu de ralentir la perte d’autonomie et de maintenir la qualité de vie dans le cadre du programme de santé publique ICOPE (Integrated Care for Older People) conçu par l’Organisation Mondiale de la Santé pour les personnes de 60 ans et plus. Il repose sur l’évaluation et le suivi de 6 fonctions essentielles : la mobilité, la nutrition, la vue, l’audition, le bien-être psychique, la mémoire.
Notre système de santé n’est pas adapté au vieillissement de la population. La prévention de la maladie d’Alzheimer, comme la prévention de la dépendance sont essentielles, au risque d’échouer ! ICOPE peut jouer un rôle déterminant, aussi bien dans la prévention que dans la diminution du déclin une fois que la maladie est installée.
Dr Bruno Vellas,Chef du service gériatrie du CHU de Toulouse, coordonnateur du Gérontopôle
Recherche et terrain : l’enjeu d’une mobilisation collective
Côté recherche, des initiatives méritant d’être soutenues et déployées à plus grande échelle seront présentés. Des modèles développés à l’étranger pourraient être adaptés en France. C’est le cas de FINGER4 (Finnish Geriatric Intervention Study to Prevent Cognitive Impairment and Disability), programme de recherche multidomaines mené en Finlande. Combinant une alimentation saine, une activité physique régulière et adaptée, un entraînement cognitif régulier, la prévention du risque vasculaire, il a été conçu pour des personnes à haut risque de développer la maladie. Après deux ans d’interventions et de suivi, leurs fonctions cognitives ont été améliorées (fonction exécutive et vitesse de traitement de l’information).
Du côté français, la grille AVEC (Audition-Vision-Équilibre-Cognition) conçue par la Société française de réflexion Sensori-Cognitive (Sofresc) est destinée au repérage des troubles sensoriels en EHPAD mais aussi utilisable par les familles. A terme, elle pourrait se déployer dans une approche plus « universelle » en intégrant des personnes dès 40 ou 50 ans.
Côté terrain, des dispositifs développés depuis plusieurs années dans les territoires seront mis à l’honneur, à l’instar des Centres de prévention Bien vieillir Agirc-Arrco à Lyon ou des ateliers mémoire de la Mutualité Française en PACA. Les premiers proposent des bilans à large spectre couvrant un ensemble d’indicateurs, dont certains concernent la maladie d’Alzheimer. Tout l’enjeu vise désormais à rajeunir le public accueilli pour initier la prévention au plus tôt (à partir de 45 ans) et renforcer l’accès via la digitalisation (téléconsultation). La prise en charge des aidants est également au cœur des axes de progrès.
Des programmes se déploient et inspirent les voisins, des initiatives locales émergent, des dispositifs évoluent, des ponts vertueux se construisent entre la recherche biomédicale et les sciences humaines et sociales. La mobilisation doit être générale….
Des solutions existent pour prévenir la maladie d’Alzheimer. Il s’agit maintenant de les faire connaître et d’inciter les français à s’investir personnellement pour améliorer leurs chances de vieillir en bonne santé cognitive.
Christine Tabuenca, Directrice Générale de la Fondation Médéric Alzheimer
Cet article a été publié par la Rédaction le